Les sociétés face au racisme structurel

Des personnes manifestent à Lyon, le 6 juin 2020, dans le cadre des manifestations mondiales "Black Lives Matter" ©AFP - JEFF PACHOUD
Des personnes manifestent à Lyon, le 6 juin 2020, dans le cadre des manifestations mondiales "Black Lives Matter" ©AFP - JEFF PACHOUD
Des personnes manifestent à Lyon, le 6 juin 2020, dans le cadre des manifestations mondiales "Black Lives Matter" ©AFP - JEFF PACHOUD
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Depuis la mort de George Floyd, de nombreuses manifestations contre les inégalités raciales et les brutalités policières ont lieu dans les grandes villes des Etats-Unis. Samedi, des dizaines de milliers d'américains ont défilé à travers le pays.

Avec
  • Patrick Weil Historien, directeur de recherche au CNRS, professeur invité à l’université de Yale et à l'Ecole d'économie de Paris.

Ce mouvement de protestation a pris une ampleur internationale et gagne aussi la France. Après le rassemblement de mardi dernier, 23 000 personnes sont de nouveau sorties dans la rue samedi, alors que les manifestations étaient interdites pour raisons sanitaires. 

Assiste-t-on à une renouveau du mouvement des droits civiques aux Etats-Unis ? Peut-on parler de racisme institutionnalisé ? Et alors que plusieurs affaires de racisme au sein de la police française ont éclaté ces dernières semaines, quelle doit-être la réponse du gouvernement ? 

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Notre invité est Patrick Weil, historien, directeur de recherche au CNRS à Paris I, professeur invité à l’université de droit de Yale aux Etats-Unis depuis 2008, auteur de « Lettres d'Amérique », un ouvrage à paraître en août aux éditions Passés Composés

Le gouvernement français face à la "gestion de l’imprévu"

" Il y a des choses qui ont bien marché dans l’État comme l’hôpital. Malgré le manque de matériel, les hôpitaux ont sauvé des milliers de vies. Quant au Ministère des Finances, il a bien assuré la mise en place du chômage partiel. Les professeurs se sont adaptés pour l’enseignement à distance. Donc l’État n’a pas failli sur tout."

On juge un homme politique à sa manière de réagir à l’imprévu. Et nos gouvernants ont mal réagi quand on leur a demandé d’être acteurs. Il fallait dire « faites vos masques » et appeler tout le monde à participer. Les Chinois, les Coréens mettaient des masques et il fallait avoir l’intuition politique de prendre des précautions nécessaires et de mettre des masques. Patrick Weil

" Le vice de ce gouvernement est de ne pas avoir distingué la fonction de soi de la fonction du ravitaillement. Il fallait créer un ministère gérant l’approvisionnement de masques, de médicaments, de blouses afin d’éviter les pénuries et l’ensemble des problèmes auxquels nous avons été confrontés."

Les sociétés face au racisme institutionnel 

D’abord dans l’histoire des États-Unis, le pays acceptait des États esclavagistes qui sont ceux du Sud. Alors que la France a aboli par deux fois l’esclavage. La seconde chose, c’est qu’il a fallu une guerre civile aux États-Unis pour que l’esclavage se termine. Et aux États-Unis, il y a un racisme institutionnel que nous n’avons pas eu en France. Malgré tout, en France, nous n’avons pas accepté l’esclavage mais la colonisation. Là on rejoint les États-Unis car après l’indépendance de l’Algérie, les immigrés algériens sont les bienvenus pour rebâtir la France. Cependant, certains Français n’ont pas accepté l’indépendance de l’Algérie et ont combattu le respect de cette égalité. Patrick Weil

" Une police républicaine et efficace est une police qui fait confiance et a la confiance de la population. La police républicaine ne peut être une armée."

La notion de « racisme structurel » est à utiliser avec beaucoup de précautions. Je pense que nous avons en France, une forme de politique qui a un racisme institutionnel. C’est au sujet des contrôles d’identité. Si vous êtes un jeune de couleur, vous avez 10 à 15 fois plus de chances de subir un contrôle d’identité et ça c'est inacceptable. Patrick Weil

Comment endiguer ce problème de fond ?

" La violence policière se gère par le juge. Une autorité comme celle de Monsieur Toubon (le Défenseur des droits) peut être garante de cette action. Il y a besoin d’évaluer et il faut faire confiance aux institutions judiciaires pour combattre cela."

Il faut traiter les problèmes de fond. Le malaise à l’égard de la police est aussi un malaise ressenti par certains français qui estiment ne pas être considérés de la même manière que le reste de leurs compatriotes. Il est fondamental que l’ensemble de nos dirigeants quand ils parlent de la France et de ses sujets montre son unité et son universalisme, c’est-à-dire sa volonté d’inclure tout le monde. C’est en le considérant comme un combat universel que le racisme sera vaincu. Pour avoir la vraie liberté de conscience, il faut avant tout considérer l’individu comme citoyen. Et non le considérer pour une religion ou une couleur de peau. Patrick Weil

Vous pouvez (ré)écouter l'interview en intégralité en cliquant sur le player en haut à gauche de cette page.

L'Invité culture
25 min

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