Peut-on sortir d'une politique culturelle de crise ?

Déplacement de Roselyne Bachelot, ministre de la Culture, au chateau d'Angers, le 12 septembre 2020. ©Maxppp - Franck Dubray
Déplacement de Roselyne Bachelot, ministre de la Culture, au chateau d'Angers, le 12 septembre 2020. ©Maxppp - Franck Dubray
Déplacement de Roselyne Bachelot, ministre de la Culture, au chateau d'Angers, le 12 septembre 2020. ©Maxppp - Franck Dubray
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Avec la pandémie qui continue, crise et soutien pour le monde culturel s’inscrivent dans un temps long. Alors, comment penser l’avenir pour la culture ? Un débat où la ministre Roselyne Bachelot livre sa perception du secteur face à la santé ou l'économie, et des perspectives face aux incertitudes.

Avec
  • Éric de Chassey Historien de l'art, directeur de l’Institut national d’histoire de l’art (INHA), ancien directeur de la Villa Médicis.
  • Françoise Benhamou Économiste de la culture, professeure à Sorbonne Paris Nord, co-présidente du Cercle des Economistes.
  • Roselyne Bachelot éditorialiste, ancienne ministre

Depuis le premier confinement du printemps, le milieu culturel connaît une alternance entre fermeture, ouverture partielle, refermeture, qui désespère les acteurs si nombreux du spectacle vivant, des musées, du patrimoine, du cinéma, de l’édition et des arts plastiques. Les termes de crise, catastrophe, effondrement, angoisse, abandon ont été écrits ou prononcés y compris par nos invités de ce soir, Éric de Chassey et Françoise Benhamou. 

Cette crise sanitaire, et ses conséquences économiques pour le secteur de la culture, va un jour s’estomper, du moins nous l’espérons. Mais une crise qui dure un an ou plus est-elle encore une crise, ou bien une nouvelle donne ? Quelle pourrait être une politique culturelle de sortie de crise, qui ne serait pas là simplement pour maintenir à flot un secteur mais pour imaginer sa réinvention après tant de bouleversements ? Dialogue avec la ministre de la culture, Roselyne Bachelot, en charge de ces questions majeures.

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La crise sanitaire révèle le principal défi de demain : concilier le numérique avec la culture patrimoniale

La crise n’est que le révélateur, l’agrandisseur d’un changement culturel comme on n’en a jamais connu : le changement des pratiques culturelles des français. L’opposition entre culture patrimoniale et culture numérique devient l’enjeu principal de la politique culturelle. Roselyne Bachelot

La sortie vers le numérique est une opportunité considérable. C’est pourquoi j’ai voulu que dans le plan de relance, 400 millions d’euros, soient consacrés à la transition numérique. Mais avec la culture numérique, on prend le goût d’une culture gratuite : cela remet en cause le modèle économique de nombre de structures culturelles. Roselyne Bachelot

Je pense qu’on peut construire des complémentarités entre l’écran et la consommation physique de culture, qui implique une sortie. Quand la culture est une sortie, on arrive à attirer les populations qui consomment avant tout la culture numérique. La crise amplifie des mouvements antérieurs, mais elle montre qu’il existe des voies de sortie. Françoise Benhamou

Tout va continuer : les mesures prises ne sont pas simplement de l’urgence, mais sont structurantes. La conciliation du numérique avec la culture patrimoniale, la préservation de la propriété intellectuelle dans un monde complètement mondialisé. Ces deux sujets sont essentiels pour conserver “l’exception culturelle française”. Roselyne Bachelot

La culture, bien plus qu’un secteur économique ?

Il y a peut-être un mauvais usage de l’économie : il existe une économie de la culture, mais on n’a jamais construit une médiathèque pour les revenus économiques qu’elle engendre. Il faut donc vraiment réfléchir aux modèles économiques de la culture. Faire des choix qui seraient dictés par l’économie serait une folie. Françoise Benhamou

Je n’ai pas perdu d’arbitrages. Parce qu’il n’y en avait pas à faire entre la santé et l'heure d’ouverture des lieux culturels. Je dois comprendre que, devant une telle situation sanitaire, on prenne un certain nombre de décisions. J’ai gagné tous les arbitrages financiers, mais devant une telle situation sanitaire, il n’y a pas d’arbitrage autre qui soit possible. Roselyne Bachelot

Si on ne sait pas de quoi on parle quand on parle de culture, on est condamnés à ne la prendre que par le biais que du secteur d’activité, du poids économique. Eric de Chassey

L'avenir

S’il le faut et si des gens ne peuvent pas avoir de droits, on recherchera des heures de travail sur un temps plus long. L’intermittence sera prise en charge. Roselyne Bachelot

Penser essentiellement et distinctement la création et le patrimoine - avec un certain nombre de critères collectivement admis - serait une manière d’avancer et de penser l’avenir pour la culture. Eric de Chassey

La culture irrigue le pays et sa vitalité économique. Dans ce que je suis en train de bâtir, j’essaye de préparer l’avenir. Roselyne Bachelot

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