De Tel Aviv à Séoul, les pionniers du numérique sous pression : épisode • 2/4 du podcast Techno-puissances : innover pour exister

Les employés d'entreprises de la haute technologie protestent contre le projet de réforme judiciaire du gouvernement israélien à Tel Aviv, le 24/01/23 ©AFP - Jack Guez
Les employés d'entreprises de la haute technologie protestent contre le projet de réforme judiciaire du gouvernement israélien à Tel Aviv, le 24/01/23 ©AFP - Jack Guez
Les employés d'entreprises de la haute technologie protestent contre le projet de réforme judiciaire du gouvernement israélien à Tel Aviv, le 24/01/23 ©AFP - Jack Guez
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Pilier du développement économique, mais aussi de la stratégie sécuritaire et diplomatique de l’Etat hébreu, l’industrie israélienne du numérique cherche, non sans mal, à se maintenir à la pointe de la compétition internationale.

Avec
  • Jacques Bendelac Docteur en économie et essayiste israélien, auteur de nombreux ouvrages
  • Jean-Christophe Noël Chercheur associé à l’Institut français des relations internationales (IFRI)
  • Juliette Schwak Enseignante chercheuse spécialiste de l’économie politique sud-coréenne

L’élection d’un gouvernement d’extrême-droite en novembre 2022 et la réforme de la justice qui s’en est suivie a provoqué une levée de boucliers en Israël, en particulier au sein du secteur des hautes technologies. Des figures comme Dov Moran, l’inventeur de la clé USB, s'inquiètent des conséquences déjà visibles pour leur industrie. Un fonds d’investissement norvégien s’est retiré du pays, ainsi que plusieurs start-up dont certaines de ces fameuses licornes qui rendent l’Etat hébreu si fier.

Forgée par plusieurs décennies de politiques publiques ciblées, l'industrie des hautes technologies a connu un essor fulgurant au point de devenir l’un des fleurons économiques israéliens. Le secteur privé a pris la suite et aujourd’hui, le pays détient le record mondial de start-up par habitant. Mais le secteur du numérique est aujourd'hui à la peine. Fragilisé par le retrait de l'État, il pâtit des pressions américaines pour éloigner la Chine du marché israélien. Le scandale autour du logiciel de cyber-espionnage Pegasus lié à la société israélienne NSO a également entrainé le secteur dans la tourmente, rappelant au passage ses liens historiques avec l'armée et le renseignement.

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Comment l’Etat israélien a-t-il favorisé l’éclosion d’une industrie florissante des nouvelles technologies ? Quels bénéfices économiques mais aussi stratégiques en a-t-il retiré ? Et quel est l’avenir de ce secteur ?

Julie Gacon reçoit Jacques Bendelac, docteur en économie et essayiste israélien ainsi que Jean-Christophe Noël, chercheur associé à l’Institut français des relations internationales (IFRI).

Selon Jean-Christophe Noël, l’armée israélienne joue le rôle d’incubateur pour la main-d’œuvre du secteur des hautes technologies : “L’armée repère les jeunes hommes et femmes présentant des dispositions pour le cyber et les intègre au sein de l’unité 8200 pour toute la durée de leur service militaire, sur le front numérique d’Israël. Quand ils entrent sur le marché du travail à 21 ans, ils sont à la pointe de l'innovation.

Pour Jacques Bendelac, la main-d'œuvre très qualifiée du secteur de la haute technologie israélienne est sa principale richesse : “La seule matière première dont dispose Israël, c’est la matière grise. Elle vient de l’armée d’abord, ensuite des immigrants arrivés dans les années 1990 et enfin des universités israéliennes qui sont encore placées parmi les meilleures au monde. Mais le manque de perspectives et les bouleversements politiques récents alimentent un phénomène de fuite des cerveaux préjudiciable à Israël.

Le développement des relations entre Israël et la Chine est vu d’un très mauvais œil par les États-Unis explique Jacques Bendelac : “L’objectif des Chinois est très clair : des transferts de technologies. C’est pourquoi les États-Unis ont souvent mis leur veto à des ventes de matériel technologique israélien qui pourrait être utiliser à des fins militaires.

Pour aller plus loin :

Cultures Monde
59 min

Seconde partie : Corée du Sud, la difficile quête d’autonomie stratégique

Joe Biden visite l'usine Samsung Electronics aux côtés du président sud-coréen et du vice-président de Samsung Electronics (D) à Pyeongtaek le 20/05/22
Joe Biden visite l'usine Samsung Electronics aux côtés du président sud-coréen et du vice-président de Samsung Electronics (D) à Pyeongtaek le 20/05/22
© AFP - Saul Loeb

Juliette Schwak, enseignante chercheuse spécialiste de l’économie politique sud-coréenne.

En insistant sur l’apport de ses entreprises à l’économie américaine à la tribune du Congrès en avril dernier, le président sud-coréen Yoon Suk-Yeol tente de sauvegarder ses intérêts stratégiques. En effet, le durcissement de la législation américaine à l’encontre des produits électroniques venus de Chine impacte les entreprises sud-coréennes implantées dans l’Empire du milieu. Séoul se trouve donc dans une position inconfortable pour trouver sa place dans la compétition internationale.

La rivalité technologique sino-américaine place la Corée du Sud dans une impasse observe Juliette Schwak : “Le pays est pris en tenaille entre des intérêts géostratégiques qui l'obligent à donner sans cesse des gages à son allié américain et des intérêts économiques, la Chine étant par exemple le premier marché d’exportation des semi-conducteurs coréens.

Références sonores & musicales

Une émission préparée par Barthélémy Gaillard et Elie Toquet.

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