Crise au JDD, symptôme d’une presse en péril ?

Rassemblement de soutien aux salariés du Journal du Dimanche, organisé par RSF (Reporters Sans Frontières) devant le Théâtre Libre, à Paris, le 27 juin 2023 ©AFP - Christophe Archambault
Rassemblement de soutien aux salariés du Journal du Dimanche, organisé par RSF (Reporters Sans Frontières) devant le Théâtre Libre, à Paris, le 27 juin 2023 ©AFP - Christophe Archambault
Rassemblement de soutien aux salariés du Journal du Dimanche, organisé par RSF (Reporters Sans Frontières) devant le Théâtre Libre, à Paris, le 27 juin 2023 ©AFP - Christophe Archambault
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La grève se poursuit au Journal Du Dimanche, après la nomination à sa tête de Geoffroy Lejeune, journaliste d’extrême droite, par Arnaud Lagardère. Avec cette nomination, la presse française est-elle en train de virer à droite toute ? Ces tensions révèlent-elles une crise plus large de la presse ?

Avec
  • Denis Olivennes Chef d'entreprise et essayiste
  • Claire Bladin Historienne des médias, professeure en Sciences de l’Information et de la Communication à l’Université Paris 13 Sorbonne Paris Cité
  • Frédéric Rouvillois Professeur de droit public à l'Université Paris Descartes

La grève se poursuit au journal du dimanche, après la nomination à sa tête de Geoffroy Lejeune, journaliste d’extrême droite, par Arnaud Lagardère. Ce dernier a récemment expliqué que ce choix était “économique” et non “idéologique” et que le JDD devait être capable de s’adapter “aux évolutions du monde”. Avec cette nouvelle nomination, la presse française est-elle en train de virer à droite toute ? Ces tensions sont-elles révélatrices d’une crise plus large au sein de la presse française ? Enfin, comment préserver l’indépendance des rédactions tout en continuant à attirer les investisseurs vers un secteur qui a bien sûr besoin de financements ?

La presse, une liberté et un pouvoir

"Ce débat pose les termes de ce que doit être la presse, son statut, ses règles. La presse d'un côté, c'est une liberté essentielle à la vie démocratique, mais c'est aussi un pouvoir, qui peut avoir des effets dévastateurs quand elle en abuse. Il faut donc la protéger et la réglementer à la fois. Il s'agit de poser des règles qui garantissent trois principaux fondamentaux : les journalistes doivent être libres. La presse doit aussi être responsable, elle doit respecter la loi et elle doit aussi respecter des règles déontologiques. Enfin, le pluralisme doit être garanti. La question qu'on doit se poser est : est-ce que nos règles actuelles garantissent ces trois principes principaux dans une large partie mais on peut faire mieux", affirme Denis Olivennes.

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La presse d'extrême-droite en France

"On peut se demander pourquoi il y a un décalage aussi vertigineux entre les intentions de vote portées sur le RN et éventuellement Reconquête, et la quasi inexistence d'une presse, non pas forcément d'extrême droite, mais d'une droite fortement assumée. Cette presse là n'existe quasiment plus depuis la libération", estime Frédéric Rouvillois.

“Lorsque l’on parle de la presse d'extrême droite, on parle de presse partisane.”, ajoute l'historienne de la presse Claire Blandin.Et il y a plein d'époques dans le paysage de la presse française, comme la période de l’entre-deux-guerres, où la créativité de la presse de droite et d'extrême droite est particulièrement importante. Mais ce n’est pas de la presse grand public, qui peut porter une culture politique, ce n’est pas une presse partisane ou militante”.

Presse d'opinion et d'information

"On a tendance à opérer une distinction qui apparaît comme évidente, cardinale, mais qui me semble poser question : il y aurait une différence entre journal d'opinion et journal information. On oublie au passage qu'il y a des tas de journaux considérés comme étant des journaux d'informations, mais qui ont été aussi au départ de journaux d'opinion comme Le Nouvel Obs, L'express, Libération. Mais est-ce qu'on peut réellement faire une distinction entre les deux ? Est-ce qu'un journal au fond ne mêle pas toujours les deux ?", interroge Frédéric Rouvillois.

"Je pense que les journaux d'informations, dans la période actuelle de post-vérité que nous connaissons, devrait se doter de procédures explicites qui garantissent la qualité de l'information qu'ils délivrent : en établissant une meilleure distinction entre information et opinion, en explicitant les instances internes de déontologie, pour afficher leurs différences et garantir la qualité de l'information délivrée. Ce qui n'empêche pas d'avoir des éditoriaux, car l'opinion est bien sur légitime et nécessaire", affirme quant à lui Denis Olivennes.

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