L’épreuve : épisode • 1 du podcast Jean Moulin, un Français libre

Pierre Cot et Jean Moulin en 1933. ©AFP
Pierre Cot et Jean Moulin en 1933. ©AFP
Pierre Cot et Jean Moulin en 1933. ©AFP
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1940 : le premier combat de Jean Moulin. De l’invasion allemande jusqu’à sa révocation en fin d’année, ses fonctions de préfet d’Eure-et-Loir le placent aux premières loges de la catastrophe. Il en garde une cicatrice à la gorge : celle qu’il s’est faite en tentant de mourir, le 17 juin.

Avec
  • Bénédicte Vergez-Chaignon Historienne
  • Christine Levisse-Touzé Historienne, présidente du conseil scientifique du musée de l’ordre de la Libération
  • Thomas Rabino Historien et journaliste français
  • Pierre Assouline Ecrivain, journaliste
  • Gérard Leray Historien
  • Laurent Douzou Professeur émérite d’histoire contemporaine à Sciences Po Lyon et à l'université Lumière Lyon 2
  • Serge Barcellini Président Général du Souvenir Français
  • Robert Badinter Avocat et homme politique français
  • Cécile Figliuzzi Directrice du centre d’archives départementales d’Eure-et-Loir
  • Albert Hude Représentant en Eure-et-Loir de l’Association Nationale des Amis de Jean Moulin

Les mémoires de Jean Moulin ne s’étalent que sur cinq jours. Le seul récit autobiographique qu’il ait laissé est le journal d’une petite semaine qui, du 14 au 19 juin 1940, voit sombrer la France. Jean Moulin est alors préfet d’Eure-et-Loir. Alors que Chartres se vide et qu’avec ses habitants partent maire, pompiers, gendarmes et commerçants, le préfet Moulin reste, seul, pour soulager sa ville en lambeaux. C’est le récit d’un homme qui se révèle à lui-même. Le 15 juin, il écrit à sa mère et à sa sœur. “Je ne savais pas, dit-il, que c’était si simple de faire son devoir quand on est en danger.

Il est en uniforme, le 17 au matin, à l’arrivée des Allemands. Le maréchal Pétain appelle quelques heures plus tard les Français à cesser le combat, mais Jean Moulin n’entend pas cette allocution… Il est alors prisonnier de nazis qui veulent le forcer à signer un document accusant un régiment de tirailleurs sénégalais d’avoir massacré des civils… Un mensonge qu’il refuse d’accréditer. Il est torturé et emprisonné. “Je ne peux pas être complice, écrit-il, de cette monstrueuse machination qui n’a pu être conçue que par des sadiques en délire. Je ne peux pas sanctionner cet outrage à l’armée française et me déshonorer moi-même. Tout plutôt que cela, tout même la mort.” Autour de lui, éparpillés, il y a les bris de verre d’une fenêtre éclatée. Il en saisit un et se taillade la gorge. Jean Moulin se suicide pour la République.

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Mais il ne meurt pas. Il est soigné et reprend ses fonctions. Il pose, quelques jours plus tard, avec l’occupant, foulard au cou.

Jean Moulin devient un préfet sous Vichy. Occupé à rétablir l’ordre et l’économie, il est sous les ordres des Allemands, comme la convention d’armistice l’ordonne. Il est contraint de faire appliquer les lois brutales, anticommunistes et antisémites demandées par Vichy et les nazis. Il les retarde, les amollit, mais il ne les saborde pas.

Il n’est pas résistant en tant que préfet. S’il a l’ambition d’une action qui puisse servir à la libération de la France, il est déjà clair pour lui qu’elle ne se fera pas dans le cadre de ses fonctions préfectorales.Bénédicte Vergez-Chaignon, historienne

Jugé trop républicain, il est révoqué par Vichy le 2 novembre 1940. Il part avec une fausse carte d’identité. “Je peux tout faire, dit-il à un de ses amis, je suis déjà mort une fois.

Jean Moulin et sa soeur Laure.
Jean Moulin et sa soeur Laure.
© AFP

Repères biographiques

  • 21 février 1939 : Jean Moulin est nommé préfet d’Eure-et-Loir
  • 3 septembre 1939 : entrée en guerre de la France contre l’Allemagne
  • 17 juin 1940 : les Allemands entrent dans Chartres ; demande d’armistice de Philippe Pétain ; tentative de suicide de Jean Moulin
  • 22 juin 1940 : Jean Moulin reprend ses fonctions de préfet
  • 10 juillet 1940 : chute de la IIIe République
  • 2 novembre 1940 : révocation de Jean Moulin par Vichy
  • 16 novembre 1940 : départ de Chartres de Jean Moulin

Les extraits de Premier Combat et des lettres de Jean Moulin sont interprétés par Charles Berling. Et avec des extraits du double téléfilm Jean Moulin, réalisé par Yves Boisset, sur un scénario de Dan Franck. La musique est signée Angélique et Jean-Claude Nachon.

Bibliographie

  • Jean Moulin, Premier Combat, Editions de Minuit, 1947
  • Daniel Cordier, Jean-Claude Lattès, Jean Moulin : l’inconnu du Panthéon, Tome 2, Le choix d’un destin : juin 1936-novembre 1940, 1989
  • Pierre Assouline, Rosebud, éclats de biographies, Gallimard, 2006
  • Gérard Leray, Les derniers jours de Jean Moulin à Chartres, Ella, 2020

Merci à l’Hôtel-Dieu de Chartres et à l’Office National des Anciens Combattants et des Victimes de Guerre d’Eure-et-Loir.

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