"X" : comment comprendre les inconnues d'Elon Musk ?

Le nouveau logo de Twitter a été projeté sur le siège de la société à San Francisco. ©Reuters - Carlos Barria
Le nouveau logo de Twitter a été projeté sur le siège de la société à San Francisco. ©Reuters - Carlos Barria
Le nouveau logo de Twitter a été projeté sur le siège de la société à San Francisco. ©Reuters - Carlos Barria
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Le 24 juillet, Twitter est devenu X, sous l’impulsion de son propriétaire Elon Musk. Depuis octobre 2022, l’entrepreneur a racheté l’application, ayant en tête de nombreuses transformations. Le passage de Twitter à X est-il un caprice, ou cache-t-il une réelle volonté politique et un projet précis ?

Avec
  • Olivier Lascar Rédacteur en chef du pôle numérique de "Sciences & Avenir"
  • Nastasia Hadjadji Journaliste indépendante spécialisée dans l’économie numérique
  • Dominique Boullier Sociologue, professeur à Sciences-Po Paris et spécialiste des technologies cognitives et des propagations.

Elon Musk ou la croisade numérique

Nastasia Hadjadji,*"*On a d'un côté Mark Zuckerberg qui incarne une version du capitalisme numérique néolibéral. Une version qui tolère la présence d'un État pour orchestrer les marchés et préserver leur monopole, précisément sur la question des technologies, mais qui s'emparent sur le plan sociétal de problématiques comme l'inclusion, le genre, les questions raciales, les questions sociales, sur l'égalité des paiements, etc." De l'autre côté Elon Musk se positionne différemment sur l'échiquier idéologique. "Aujourd'hui, Twitter est le reflet, à mon sens, d'une mutation du capitalisme numérique, incarné par cette figure qu'est Elon Musk mais également ais d'autres figures comme Peter Thiel ou David Sachs, des investisseur très influent de la Silicon Valley. Ces hommes là incarnent un tournant réactionnaire du capitalisme numérique. Ils sont d'ailleurs dans une croisade qu'ils nomment de leurs propres termes anti-woke. Leur vision qui est extrêmement libertarienne, voire anarchie-capitaliste par certains égards avec la volonté de supprimer toutes formes d'interventions publiques et de supprimer les Etats en les remplaçant par le marché. Donc oui, il y a un projet politique d'Elon Musk."

Pour Dominique Boullier, il faut nuancer ce propos sur le caractère idéologique. "Ils (Musk et Zuckerberg) sont quand même issus de la même matrice, la matrice libertarienne. Certes Zuckerberg affiche des valeurs plus tolérables pour une société démocratique. Mais rappelons quand même l'événement Cambridge Analytica. Après ce scandale, il a été forcé de rentrer dans le rang, ce qui n'est pas le cas d'Elon Musk. Si l'on veut faire une opposition de typologie de capitalisme comme Nastasia, il ne faut pas oublier que le background de Musk se fonde sur l'industrie alors que le patron de Meta a toujours dépendu de la publicité pour faire grandir son réseau social, ce qui l'a poussé à adapter son image aux convenances de la société. De son côté, Musk s'en moque. Il incarner une forme de disruption que j'appelle sadique. A la manière du patron d'Uber, c'est la culture du "je bouscule tout et j'en jouis". C'est une jouissance du tout casser, du mépris des lois, sans principe de coopération ou d'esprit démocratique. C'est une culture qui pousse même Musk a casser son propre jouet qui vient d'acheter : Twitter. Ce type de libertarianisme peut être très violent.

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Pour aller plus loin

Olivier Lascar,  Elon Musk, l'homme qui défie la science, Alisio, 2022
Dominique Boullier,  Comment sortir de l’emprise des réseaux sociaux, Le Passeur, 2020.

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