Déminer nos angoisses : épisode • 2/4 du podcast L’épicurisme, une pensée qui nous veut du bien

"Il ne reste plus rien à redouter dans la vie, pour qui a vraiment compris que hors de la vie il n’y a rien de redoutable" Epicure ©Getty - stellalevi
"Il ne reste plus rien à redouter dans la vie, pour qui a vraiment compris que hors de la vie il n’y a rien de redoutable" Epicure ©Getty - stellalevi
"Il ne reste plus rien à redouter dans la vie, pour qui a vraiment compris que hors de la vie il n’y a rien de redoutable" Epicure ©Getty - stellalevi
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Les épicuriens nous apprennent à nous défaire de nos craintes. En effet, selon eux, dès que l'on acquiert une meilleure connaissance du monde par l’étude de la nature, la crainte de la mort n'a plus de sens. Quelle est donc cette approche du monde pouvant déminer nos angoisses ?

Avec
  • Alain Petit Professeur de philosophie à la Faculté des Lettres de Clermont-Ferrand
  • Renée Koch-Piettre

Selon les épicuriens, il est possible de vaincre nos angoisses à l’aide de la raison. Ainsi, Epicure émet quatre propositions constituant quatre remèdes, ou “tetrapharmakos” : "ne craignez pas les dieux", "ne vous inquiétez pas de la mort", "le bonheur est facile à obtenir" et "la douleur est facile à dominer".

Accepter les émotions mais savoir orienter nos pensées

Toutefois, “les épicuriens ne cherchent pas à dominer leurs sentiments”, commente Renée Koch-Piettre. Par exemple, “si vous perdez un ami, c’est normal que dans un premier temps vous en soyez à souffrir”. Il s’agit par la suite de saisir qu’il s’agit d’un “événement passé”, que “cela devait se faire”. En ce sens, les épicuriens se distinguent des stoïciens pour qui l’essentiel est “de surmonter la douleur virilement” ajoute Renée Koch-Piettre.

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Nos craintes sont vides car elles ne nous concernent pas. Par exemple, la crainte de notre propre mort n'a pas de sens puisque nous ne serons pas présents lorsqu’elle adviendra. C’est une véritable philosophie qui place toute son importance sur le moment présent. Or, ce présent peut être gâché par ces angoisses. “ Lucrèce décrit la peur de la mort comme le poison qui trouble absolument toute la vie et qui suscite même le vide” commente Alain Petit.

LSD, La série documentaire
55 min

Une philosophie trop intellectualiste ?

Il est possible de noter toutefois les limites d’une telle philosophie. Savoir que nos craintes sont vides suffit-il vraiment à ne plus les craindre ? Pour Alain Petit, “le point de faiblesse de l’épicurisme n’est pas son empirisme présumé mais c’est que le tetrapharmakos repose sur un volontarisme, donc un intellectualisme qui fait confiance au pouvoir de la pensée”.

Néanmoins, Renée Koch-Piettre nous rappelle qu’il faut comprendre cet intellectualisme comme “ascèse”, c’est-à-dire “comme exercice du quotidien”. En ce sens, la différence entre “l’âme du rationnel” (animus) et “l’âme du sensible” (anima) est essentiel : il faut habituer l’animus à résister contrairement à l’anima.

🎧 L'émission est à écouter dans son entièreté en cliquant sur le haut de la page.

Pour en parler

Renée Koch-Piettre, helléniste et directrice d’étude émérite à l’École Pratique des Hautes Études (EPHE, Université Paris Sciences Lettres). Elle a notamment publié deux ouvrages sur l’épicurisme antique et conduit des recherches comparées sur les logiques des systèmes polythéistes :

  • Comment peut-on être dieu ? La secte d’Épicure, Paris, Belin, 2005.
  • Épicure, la voix de la nature, Paris, Médicis Entrelacs, 2017.

Alain Petit, professeur de philosophie à la Faculté des Lettres de Clermont-Ferrand. Il appartient au centre de recherche “Philosophie et rationalité” de Clermont-Ferrand et travaille en philosophie antique et en philosophie comparée.

Références sonores

  • Extrait du film Blade Runner, réalisé par Ridley Scott et sorti en 1982.
  • Lecture par Riyad Cairat d'un extrait d'Épicure, Lettre à Ménécée, entre 306 - 270 avant J.-C., (traduction d'Octave Hamelin, La revue de métaphysique et de morale, 1910).
  • Extrait du documentaire "La thérapie du bonheur" réalisée par Sabine Gisiger, 2014.
  • Extrait du film "Mar Adentro" réalisé par Alejandro Amenabar, 2005.
  • Lecture par Riyad Cairat d'un extrait de Épicure, Lettre à Ménécée, entre 306 - 270 avant J.-C., (traduction d'Octave Hamelin), La revue de métaphysique et de morale, 1910).
  • Chanson de fin : "Nobody Can live Forever" est une chanson de Tim Maia sortie en 1976.
  • Musique de notre nouveau générique : "Sabali" d'Amadou et Mariam.

Le Pourquoi du comment, la chronique de Frédéric Worms

Retrouvez la chronique de Frédéric Worms sur la diversité  ici.

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