Aide aux migrants : les ONG mises hors-la-loi

Port de Marina Di Carrara, à 50 km au nord de Pise, le 24 août dernier. Habitué à sillonner la Méditerranée pour secourir les barques vermoulues sur lesquelles s’entassent les migrants venus des côtes tunisiennes ou libyennes, le bateau Open Arms reste coincé à quai. Sous le coup d’une saisie administrative des autorités maritimes, l’équipage de cette ONG espagnole est sanctionné pour avoir lancé plusieurs opérations de sauvetage au cours d’une même rotation avant de toucher terre. Après avoir bloqué de la même manière l’Aurora, vaisseau amiral de Sea Watch, et le Sea-Eye 4, c’est la troisième fois en moins de trois jours que le gouvernement italien sanctionne une ONG de sauvetage en mer.

Une offensive administrative rendue possible par l’adoption d’un décret-loi en janvier dernier. Le texte impose de nouvelles contraintes aux bateaux humanitaires : l’obligation de regagner les terres après chaque sauvetage, le plus souvent dans un port situé à l’extrême-nord de la botte, à plus de mille kilomètres de la zone de sauvetage des migrants naufragés. Imaginées par le gouvernement de Giorgia Meloni, ces dispositions entravent un peu plus l’action des humanitaires engagés en Méditerranée. Une fois leur premier sauvetage effectué, les équipages sont désormais déchirés entre devoir d’assistance aux personnes en détresse et perspective d’essuyer amendes et condamnations une fois rentrés au port s’ils viennent à secourir d’autres embarcations en difficulté.

Comment les ONG de secours en mer s’organisent-elles face à ces nouvelles contraintes, et quelles conséquences bien concrètes observe-t-on pour les migrants naufragés ? De quelles armes juridiques, politiques et matérielles disposent-elles pour s’opposer à l’Etat italien ? Et enfin, qu’est-ce que cette nouvelle offensive italienne contre les ONG dit de l’évolution des relations entre Rome et les associations humanitaires ?

Le focus du jour - En Pologne, la forêt de Bialowieza au cœur du jeu politique

A deux semaines des élections législatives et alors que les associations alertent sur la situation des migrants passant par la Biélorussie, la question migratoire est au cœur du débat politique. Quels risques encourent les Polonais qui viennent en aide aux ressortissants ouest-africains, afghans, irakiens ou syriens perdus dans la forêt de Bialowieza ?

Pour aller plus loin

Michael Bunel est le co-auteur du roman graphique Rescapé.e.s, carnet de sauvetages en Méditerranée, éd. La boîte à bulles, mai 2023

Marta Esperti est l'autrice de l'article Beetwen humanitarianism and solidarity at sea : the recent emergence of "citizen humanitarianism" in the Central Medirerranean paru sur le site de la faculté de droit d'Oxford (en anglais)

Dorota Dakowska a publié l'article D'une frontière l'autre, les ONG polonaises d'aide aux réfugiés entre la militarisation de la frontière bélarusse et la guerre en Ukraine, revue Hermès, 2022

Références sonores

En janvier 2023, le ministre de l’Intérieur Matteo Piantedosi défend la nouvelle loi encadrant les sauvetages en mer pratiqués par les ONG
Juan Matias Gil, responsable des opérations de secours en mer chez MSF, dénonce l’entrave à l’action humanitaire 
Alessandro Poro, président de SOS Méditerranée Italie, explique les contraintes liées à la nouvelle procédure
Le ministre de l’Intérieur Matteo Piantedosi développe l’argumentaire juridique du gouvernement italien

La Polonaise Maria Ancipiuk, présidente du conseil municipal de Michalewo, sait qu’elle prend des risques en venant en aide aux migrants venus de Biélorussie - SSR (société suisse de radiodiffusion et télévision)) novembre 2021

Références musicales

Instrumental : Boards of Canada - ‘New seed’
Non siamo pesci - Chris Obehi