Palestine : une société entre guerre et exil

Des jeunes palestiniens montrent leur drapeau lors d'une manifestation en Cisjordanie ©AFP - Thomas COEX
Des jeunes palestiniens montrent leur drapeau lors d'une manifestation en Cisjordanie ©AFP - Thomas COEX
Des jeunes palestiniens montrent leur drapeau lors d'une manifestation en Cisjordanie ©AFP - Thomas COEX
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Le bilan de l’explosion qui a touché avant-hier un hôpital à Gaza ne cesse de s’alourdir. Pour échapper aux bombardements, déjà plus d’un million de Gazaouis ont été déplacés, selon l’ONU. Doit-on craindre un nouvel exil palestinien, 75 ans après le départ forcé dans l’enclave en 1948 ?

Avec
  • Stéphanie Latte Abdallah Historienne, politologue, anthropologue, directrice de recherche au CéSor (EHESS/CNRS)
  • Elias Sanbar Historien, poète, essayiste, traducteur du poète Mahmoud Darwich et ancien ambassadeur de la Palestine auprès de l’Unesco

Les États-Unis appellent à la modération

Face à l’explosion d’un hôpital de Gaza, l’historien, poète et ambassadeur de la Palestine auprès de l’UNESCO Elias Sanbar réagit : “c’est un drame. Je pense que nous sommes face au résultat d’années d’impasses et face à une grande crise interne israélienne. Quel que soit le résultat de l’enquête, les deux partis ne seront jamais d’accord.” Ce dernier émet par ailleurs des réserves quant à la possibilité d’une attaque terrestre israélienne : “il est très peu probable que cela ait lieu, parce que les États-Unis mettent une grande pression sur les Israéliens pour qu’il n’y ait pas d’escalade. Joe Biden a dit qu’il fallait qu'Israël devait tout faire pour raviver la solidarité entre les deux États.” Le président américain a également exigé de la clarté et de la cohérence de la part d'Israël, sonnant alors comme une véritable demande de modération. Selon Elias Sanbar, les Américains sont inquiets que ce conflit se transforme en une nouvelle crise afghane, d’autant plus que de nombreux États arabes sont intimement liés à la cause palestinienne.

Des manifestations en Cisjordanie contre Mahmoud Abbas

L’incapacité d’Israël à mener une offensive terrestre conséquente est notamment due à ce qu’il se passe actuellement en Cisjordanie, explique l’historienne et chercheuse au CNRS Stéphanie Latte Abdallah : “il faut énormément de militaires pour conduire une attaque contre le Hamas et il n’y a que 170 000 soldats disponibles. Il y a une crainte de l’armée israélienne de ne pas pouvoir mener cette opération en raison des contestations contre l’autorité palestinienne de Mahmoud Abbas en Cisjordanie.” Elle n’estime pas que cela ne bénéficie qu’au Hamas, mais évoque un “front d’opposition” à la politique sécuritaire palestinienne, une gauche laïque qui s’élève contre le président qui n’est, en réalité, soutenu que par une fraction de la population.

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Une opportunité pour le Hamas ?

“Avec cette crise, le Hamas vient de prendre le contrôle de la question palestinienne. Il apparaît comme le porte-drapeau de ce que des millions de Palestiniens appellent la résistance contre l’occupant. Il a eu un succès énorme avec cette crise”, estime Elias Sanbar. Désormais, le Hamas se retrouve en effet comme étant l’interlocuteur palestinien principal, alors qu’Israël est déjà aux portes d’une crise intérieure très importante. “Je suis furieux que pendant trente ans, les États-Unis aient regardé les négociations se faire, sans faire pression. C’est une défaite pour ceux qui pensaient que pendant trente ans la solution à deux États était possible”, ajoute-t-il.

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