Le sionisme, aux racines d'Israël : épisode • 6 du podcast Israël-Palestine : les mots de la guerre

La première "Aliyah" désigne la première vague majeure d'immigration sioniste vers ce qui est aujourd'hui Israël, entre 1882 et 1903. ©Getty - Universal History Archive/Universal Images
La première "Aliyah" désigne la première vague majeure d'immigration sioniste vers ce qui est aujourd'hui Israël, entre 1882 et 1903. ©Getty - Universal History Archive/Universal Images
La première "Aliyah" désigne la première vague majeure d'immigration sioniste vers ce qui est aujourd'hui Israël, entre 1882 et 1903. ©Getty - Universal History Archive/Universal Images
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Dans cet épisode du podcast "Israël-Palestine, les mots de la guerre", Alain Dieckhoff, directeur du Centre de recherches internationales (CERI) de Sciences Po, décrypte l'origine du sionisme. Organisé à la fin du XIXe siècle, ce mouvement est aux racines de la création de l'État d'Israël.

Avec
  • Alain Dieckhoff Sociologue, directeur de recherche CNRS et directeur du CERI de Sciences Po

Dans ce podcast, " Israël-Palestine, les mots de la guerre", des spécialistes reviennent sur les mots qui permettent aujourd'hui d'éclairer  le conflit israélo-palestinien. Alain Dieckhoff, directeur du CERI-Sciences Po, directeur de recherche au CNRS et ayant co-dirigé l'ouvrage Un monde en crises (Presses de Sciences Po, 2023), revient sur la genèse et l'histoire du mouvement  sioniste.

Un territoire, pas "des terres"

Dans les années 1880, avec en toile de fond les pogroms dans la Russie tsariste, le mouvement sioniste commence à s'agréger, en partie "comme une réponse à cette manifestation brutale de l'antisémitisme", explique Alain Dieckhoff. Deux racines fondent le "sionisme" : une terminologie germant de "Sion", une colline au sud de la vieille ville de  Jérusalem, par extension une autre appellation pour cette future capitale ; et une figure tutélaire en la personne du Russe Léon Pinsker avec son ouvrage Auto-Émancipation, dont le titre se réfère au peuple juif.

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"L'idée vraiment capitale, c'est de donner un territoire aux juifs, raconte le sociologue. Et j'insiste sur le terme "territoire", et non pas terres". Exactement comme dans L'État des Juifs, manifeste politique du sionisme rédigé par le juif viennois Theodor Herzl en 1896. Pourquoi établir cet État en région palestinienne plutôt qu'ailleurs ? Alain Dieckhoff résume : "parce que, après le décès de Herzl en 1904, pour l'organisation sioniste plutôt composée alors d'une intelligentsia de juifs laïcs, mais quand même attachés à la culture juive, [...] le projet ne peut s'incarner qu'à un endroit pour des raisons historiques et mémorielles : la Palestine, la terre d'Israël en hébreu, Eretz Yisrael."

Palestiniens : "la question cachée"

C'est ainsi qu'à cette période, la première "Aliyah" se met en branle : la "montée" d'immigrants juifs en ce qui deviendra Israël. "Et évidemment, ils rencontrent immédiatement la population arabe quand ils débarquent à Jaffa ou à Haïfa, des villes arabes", indique le sociologue. Mais la question de la cohabitation n'aurait pas été clairement posée en amont. "Un auteur sioniste a écrit un article dans ces années-là qui s'appelle La Question cachée, complète-t-il. La question cachée, c'est en fait la question arabe". Selon lui, il y a eu une "sorte de cécité volontaire" : "il n'y a pas de réflexion en amont sur ce que ça signifie exactement, un État juif, ni pour les juifs en réalité, ni pour les minorités non-juives."

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Pour s'implanter, les nouveaux arrivants achètent des terres à des propriétaires arabes, "souvent absentéistes, qui ne résident pas en Palestine", précise Alain Dieckhoff. Résultat : en 1945, 7 % des terres en Palestine appartiennent aux partisans du projet sioniste. La Seconde Guerre mondiale précipite ces déplacements. Une commission d'enquête est envoyée par les Nations unies, le vote de 1947 partage la Palestine mandataire en deux États : un État juif et un État arabe." À partir de ce moment-là, ils obtiennent par la communauté internationale une souveraineté politique sur à peu près 55 % de ce qu'était la Palestine mandataire", résume le sociologue.

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