Rachat de Casino, inflation alimentaire : la grande distribution en fin de course ?

La filiale Casino est en passe d'être achetée par le groupe Auchan. ©AFP - DAMIEN MEYER
La filiale Casino est en passe d'être achetée par le groupe Auchan. ©AFP - DAMIEN MEYER
La filiale Casino est en passe d'être achetée par le groupe Auchan. ©AFP - DAMIEN MEYER
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La saga Casino a trouvé son dénouement : le tandem Auchan/Intermarché annonçait ce 18 décembre le rachat des hypermarchés et supermarchés du groupe Casino dans leur "quasi-totalité". S'agit-il d'un cas à part ou le signe précurseur de l'essoufflement d'un modèle, celui de la grande distribution ?

Avec
  • Philippe Moati Professeur d'économie à l'Université Paris-Diderot et co-fondateur de l'Observatoire société et consommation

Le groupe Casino est composé par ailleurs des enseignes Monoprix, Franprix et Naturalia, ainsi que des hypermarchés Géant Casino. Si la dette de ce groupe se trouve désormais insolvable, l'économiste Philippe Moati souligne la stratégie du directeur Jean-Charles Naouri : "le patron du groupe, avait trouvé une formule qu'il avait appliquée à son groupe, qui était à mon avis très avant-gardiste : « nous sommes en train de passer d'une distribution de masse à un commerce de précision ». Il avait bien compris que ces grosses usines à vendre étaient un fruit du passé et qu'aujourd'hui, face à une société qui s'était complexifiée, à des comportements de consommation plus divers, il était nécessaire de segmenter. On ne peut pas espérer choper tous les consommateurs comme ça avec un seul concept qui était l'hypermarché."

Pour comprendre la chute du groupe, il convient de revenir sur le modèle économique du groupe. En effet, ce dernier s'est construit sur une dette qui n'a cessé de s'accroître. Pour pallier cet endettement croissant, le groupe a augmenté les prix pour espérer engendrer davantage de bénéfice. Les prix varient d'ailleurs parfois jusqu'à 35 % entre deux magasins Casino : "les consommateurs ont une notion vague du prix de chaque produit, mais ils ont une notion assez précise du prix du caddie. Lorsqu'on perd un client qui va chez le concurrent, c'est très dur de le faire revenir. Il aurait fallu réinvestir beaucoup dedans pour relancer la dynamique commerciale, à la fois pour aménager les magasins différemment et redonner du tonus en termes de compétitivité prise. Et là, le groupe n'avait plus les moyens de ses ambitions."

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L'hypermarché est-il un modèle démodé ?

"Ce qui distingue l'hypermarché des autres formats alimentaires, c'est précisément la combinaison d'alimentaires et de non alimentaires. Or, le non-alimentaire s'effondre d'année en année. Ce qui veut dire que vous avez de grands hypermarchés qui s'étaient développés pour avoir de l'espace pour le monde alimentaire, qui ont des surfaces excessives.  Les grands hypermarchés sont pénalisés par l'effondrement de l'activité dans le non alimentaire. Cela fait bien longtemps qu'il n'y a plus d'articles de sport dans les hypermarchés", témoigne l'économiste.

Le modèle de l'hypermarché est également menacé par des commerces de proximité, aux formats plus petits. Si Philippe Moati rappelle que les périodes de tensions inflationnistes ont donné l'avantage aux enseignes d'hard discount telles que Lidl, le format de ce type d'enseigne ne correspond plus aux volontés des consommateurs : "l'hyper, ça représente aujourd'hui le caractère inhumain du commerce. C'est la surconsommation, c'est la pléthore, c'est le gaspillage, c'est la grande entreprise qui appartient au système. À l'inverse, on apprécie le petit, celui qui est ancré sur un territoire, celui qui paraît authentique, celui qui est incarné par des humains. De plus, lorsqu'on est soucieux de son pouvoir d'achat, acheter au jour le jour juste ce dont on a besoin, eh bien, c'est une manière d'être raisonnable."

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