Les pressions internationales sur Israël peuvent-elles être efficaces ?

De nombreuses voix appellent à un cessez-le-feu, voire à la fin de l’opération militaire israélienne à Gaza, en réponse à l’attaque du Hamas du 7 octobre. Selon les chiffres du Ministère de la santé du Hamas, les bombardements ont déjà causé plus de 20 000 morts dont une majorité de civils.

Vendredi dernier 22 décembre, après de longues négociations, le Conseil de sécurité de l’ONU s’est prononcé sur une résolution destinée à améliorer l’aide humanitaire dans la bande de Gaza, où tout vient à manquer depuis le début du conflit. Le Président des Etats Unis Joe Biden a appelé à la protection des populations civiles lors d’un échange téléphonique avec le premier ministre Benyamin Netanyahou.

Pourtant, ce weekend comme hier et ce matin encore, de nouveaux bombardements ont causé des dizaines de morts civiles. La bande de Gaza, où s’est rendu Benjamin Netanyahou pour célébrer les 80 jours du début de l’offensive israélienne avec l'intention affirmée du premier ministre israélien, d’intensifier les combats et de poursuivre. Plus que jamais, le gouvernement israélien semble déterminé dans son opération “Epée de fer" malgré un risque d’isolement international.

Alors que peut encore faire la communauté internationale ? Quels sont les leviers dont disposent l’ONU, l’Union Européenne, les Etats Unis mais aussi les Etats voisins d'Israël ? Comment les politiques intérieures américaine et israélienne s’entrecroisent dans les négociations en cours ? Les pressions sur Israël et le gouvernement de Netanyahou peuvent-elles être efficaces pour permettre une intervention humanitaire à la hauteur des enjeux dans la bande de Gaza ?

Avec

- Rym Momtaz Chercheuse en relations internationales à l'International Institute for Strategic Studies

- Vincent Lemire Historien, maître de conférences en histoire contemporaine, spécialiste de l'histoire du conflit israélo-palestinien, et de la ville de Jérusalem

- Guillemette Thomas Coordinatrice médicale MSF France dans les territoires palestiniens

Deux impératifs semblent se distinguer selon Rym Momtaz, "il y a une vraie tension entre l'impératif de sauver les otages et l'impératif militaire. Les gens qui sont le plus mobilisés sont les familles des otages, des ex-otages et des otages qui font pression sur le gouvernement. Ce sont ceux qui sont les plus remontés contre le gouvernement de Netanyahou, qui trouvent que Netanyahou ne leur a pas assez parlé, n'a pas assez communiqué avec eux et n'en fait pas une priorité le fait de libérer leurs proches et de l'autre côté, l'impératif militaire qui a été défini comme éradiquer le Hamas".

"Le problème aujourd’hui est Netanyahou" exprime Vincent Lemire. "C’est quelqu’un qui n'avait pas le leadership sur son pays avant le 7 octobre. Il l'a encore moins depuis cette date. Sa seule option est de continuer la guerre, il ne peut pas l'arrêter. Il ne pourra jamais l'arrêter. (…) Netanyahou encourage des réflexes de rage et de vengeance dans son opinion publique, mais ce que Biden est en train de comprendre et ce qu’il faudrait que l’Europe arrive à formuler aussi, c’est que le destin d’Israël ne coïncide pas avec le destin de Netanyahou".

Guillemette Thomas insiste finalement sur la violence du conflit, "la situation est extrêmement tendue. Il y a une augmentation des violences perpétrées par les colons, c'est un fait, mais également perpétrées par l'armée israélienne qui occupe la Cisjordanie depuis 1967. Il y a une augmentation majeure des incursions, une augmentation de la violence, et nous, Médecins Sans Frontières, nous constatons qu’il y a aussi un changement dans la typologie des interventions, avec beaucoup plus de violence, et des blessures par armes à feu, qui visent avec une intention délibérée de tuer les personnes".

Pour aller plus loin :

- Vincent Lemire est l'auteur de la bande-dessinée  Histoire de Jérusalem avec Christophe Gaultier (Editions Les Arènes, 2023).