Pourquoi l’élevage est-il le secteur fragile de l’agriculture française ?

Jean-Marie Goujat se tient au milieu d'un troupeau de vaches, le 27 janvier 2020 dans son étable à Cours La Ville, en France. ©AFP - Jeff Pachoud
Jean-Marie Goujat se tient au milieu d'un troupeau de vaches, le 27 janvier 2020 dans son étable à Cours La Ville, en France. ©AFP - Jeff Pachoud
Jean-Marie Goujat se tient au milieu d'un troupeau de vaches, le 27 janvier 2020 dans son étable à Cours La Ville, en France. ©AFP - Jeff Pachoud
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Le 25 février, le salon de l'agriculture a ouvert ses portes. Dans le même temps, le gouvernement a lancé un plan pour la souveraineté de l'élevage, un métier de moins en moins rentable. Comment expliquer les difficultés rencontrées ? Quel avenir se dessine pour l'élevage français ?

Avec
  • Jean-Michel Schaeffer Président d'Anvol, l'interprofession de la volaille
  • Félice Branger Eleveur de vaches laitières à Rostrenen, dans les côtes-d'Armor
  • Caroline Monniot Economiste, responsable du service économie des filières à l'institut de l'élevage
  • Nicolas Coudert Eleveur de vaches allaitantes et de porcs cul noir limousin à Sereilhac, dans le département de la Haute-vienne

De tous les secteurs agricoles, l’élevage est celui où le taux de pauvreté est le plus élevé.

Comme pour le reste de l’agriculture, s’il faut évidemment distinguer les types d’élevage, la réalité n'étant pas la même selon que l’on produise du porc ou des bovins, des volailles ou des ovins, la période est particulièrement difficile car l’élevage nécessite des investissements considérables, du temps pour que l’animal produise, de la reconnaissance des éleveurs mais aussi des amis et voisins capables de prendre le relais en cas de maladie, de coup dur ou même, soyons fous, de vacances.

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De quoi, pour les éleveuses et éleveurs, se poser la question de leur place en France, en Europe et dans le monde quand la baisse attendue de la consommation, le souci du bien-être animal, le réchauffement climatique et la mondialisation des échanges menacent les différents modèles, bio et non bio du secteur.

Quelles sont les difficultés auxquelles les éleveurs et éleveuses font face ?

Nicolas Coudert : « L’élevage, c'est un secteur fragile parce qu'on travaille avec du vivant. C'est compliqué. On le voit aussi sur la partie économique. Les résultats d'exploitation et le résultat courant sur la partie élevage font partie des résultats les plus faibles de l'agriculture française. Donc oui, c'est un secteur qui est très dépendant de plein de paramètres que l'éleveur a du mal à maîtriser aujourd'hui en totalité car ça lui demande beaucoup de compétences sur différents sujets ».

Pour Jean-Michel Schaeffer, la difficulté de la profession réside aussi dans les coûts, de plus en plus importants : « Le constat que je fais, c'est que les investissements sont de plus en plus lourds. Par exemple, le poulailler à construire coûte de plus en plus cher et, depuis 2020-2021, on a presque 30% de surcoût par rapport à avant, donc on est face à des emprunts massifs. Et on a des jeunes aussi qui veulent avoir une qualité de vie, qui veulent équilibrer travail, vie de famille, un peu de vacances, et qui veulent, par rapport aux investissements qu'ils mettent sur la table, sortir quand même un revenu décent ».

Caroline Monniot réagit sur le souci de la relève dans la profession : « Pour les jeunes on a ce problème d'attractivité qui s'ajoute à un problème démographique qui est général puisqu'on a installé beaucoup d'éleveurs au début des années 90 et en ce moment ces éleveurs sont tous en train de prendre leur retraite et donc on a beaucoup plus de départs que dans les années précédentes. Et, même si on a toujours des jeunes qui s'installent on n'en a pas suffisamment pour compenser tous ces départs »

Félice Branger parle de l’enjeu des aides pour soutenir les éleveurs et éleveuses : « Quand les aides sont bien faites, il n'y a pas de problème. Je prends l'exemple des MAEC, mesures agro-environnementales et climatiques, qui consistent à mettre moins de maïs et plus de prairies pour que les vaches sortent ». Félice Branger salue ces dispositifs mais déplorent que ces derniers ne s’inscrivent pas dans le temps : « Lorsque l’on met en place cette mesure-là, en échange, on a des aides de la part de l'État via la région. Ce dispositif est très bien fait, il aide des fermes à faire de la transition agro-écologique. Au niveau de la Bretagne, 3 000 fermes signent, mais le problème, c’est que ça a tellement bien marché qu’il a fallu que l’on se batte au niveau des réseaux d’agriculture durable pour maintenir ces aides-là ».

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