Attentat à Moscou : des répercussions hautement politiques pour Vladimir Poutine ?

L’attentat a été vite revendiqué par une branche centre-asiatique de l’État islamique ; pourtant, cette piste n’a pas été reprise par les autorités russes, accusant quant à elles l’Ukraine dans leurs déclarations officielles. Moins d’une semaine après la réélection écrasante de Vladimir Poutine, quelles sont les conséquences politiques de cette tragédie pour le Kremlin ?

Pourquoi Daesh attaque-t-il la Russie ?

Comme l’explique Anne Le Huérou, maîtresse de conférence à l’Université Paris Nanterre et spécialiste de la Russie, il est aujourd’hui reconnu que l’attentat commis vendredi 22 mars en périphérie de Moscou est le fruit de Daesh. Elle revient sur les raisons expliquant le choix de cette organisation terroriste : “d’un point de vue logistique, la Russie est très occupée par la guerre en Ukraine, surtout au niveau du plan de travail des services de sécurité. Le FSB est occupé par la répression des militants anti-guerre en Russie et la communauté LGBT. La Russie a baissé la garde face à la menace de Daesh qui était pourtant présente et indiquée par les services de renseignement américains quelques semaines auparavant. La deuxième raison, qui porte plus sur le fond, est que la branche de Daesh Khorasan s'intéresse à la région de l'Asie centrale et de l'Afghanistan. Elle a été fondée, par des personnes opposées aux talibans qui avaient commis des attentats extrêmement meurtriers juste après la prise de Kaboul en 2021 et qui seraient effectivement dirigés contre la Russie et ses soutiens dans la région, donc l'Iran et l'Afghanistan des talibans. Il y a sans doute une problématique centrasiatique avec le Tadjikistan et d'autres pays d'Asie centrale".

Vladimir Poutine accuse l’Ukraine

Le président russe fraîchement réélu prétend que l’Ukraine est l’auteur de cet attentat. Anne Le Huérou explique les raisons de cette accusation : “d’une part, pour masquer le fait que cet attentat peut être considéré comme un échec des services de sécurité dans un pays où la sécurisation du pays et de la population est la marque de fabrique du régime. Il faut rappeler que Vladimir Poutine est arrivé au pouvoir à la suite d'attentats extrêmement meurtriers à Moscou en 1999. D’une autre part, il y a évidemment la volonté de rajouter une couche sur le grand ennemi de la Russie, afin de prétexter cette tragédie pour continuer à frapper l’Ukraine. De plus, cet évènement peut ternir ce début de cinquième mandat, cette piste ukrainienne est donc la seule vendable et acceptable, car elle se fond dans le tableau général de cette guerre”.