La lecture attire de moins en moins les jeunes

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La lecture attire de moins en moins les jeunes

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Si pendant le confinement les 15-24 ans ont eu tendance à lire plus de livres, l'année 2020 est marquée par une baisse du nombre de jeunes lecteurs.
Si pendant le confinement les 15-24 ans ont eu tendance à lire plus de livres, l'année 2020 est marquée par une baisse du nombre de jeunes lecteurs.
© Getty - Klaus Vedfelt

Le dernier baromètre "les Français et la lecture" de l’institut Ipsos pour le Centre national du livre révèle que 86% des Français ont lu un livre ou plus en 2020, une baisse de 6 points par rapport à 2019. La catégorie des 15-24 ans est particulièrement touchée. Un phénomène qui n’est pas nouveau.

Ce n'est pas ce que laissaient envisager les longues files d'attente devant les librairies à leur réouverture. Pourtant, en 2020, les Français ont moins eu le goût pour la lecture qu’à l’accoutumée. D’après un sondage Ipsos pour le Centre national du livre publié cette semaine, 86% des personnes interrogées ont déclaré avoir lu au moins un livre en 2020, soit six points de moins que lors du précédent sondage, en 2019.

Ces chiffres sont encore plus importants chez les jeunes. Car en 2021, seuls 80% des 15-24 ans se perçoivent comme lecteurs, ils étaient 92% à le penser en 2019. 91% des jeunes sondés ont lu au moins un genre littéraire cité dans l'enquête, une chute de sept points par rapport à 2019. Ils restent malgré tout la tranche d’âge qui lit le plus, juste devant les seniors. 

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Des lectures essentiellement "utilitaires"

Conséquence des confinements et fermetures d’établissements scolaires et universités, les jeunes lecteurs ont lu des ouvrages surtout qualifiés d'utilitaires. Ainsi, arrivent dans le top 5 des genres les plus lus : les livres pratiques, d’art de vivre ou de loisirs (cuisine, décoration, voyages, jardinage, etc.), les livres sur l’histoire, suivis de la littérature classique française ou étrangère et enfin les dictionnaires et encyclopédies. Il n’y a guère que la science-fiction qui se maintient à la deuxième place des ouvrages dont les jeunes sont friands, bien qu’elle perde tout de même dix points par rapport à 2019. 

Plus surprenant, la BD perd du terrain, tout comme la poésie ou les livres pour enfants. Quand 2020 fut pourtant une année record de vente de bande dessinée, avec le manga pour grand vainqueur. Mais l’actualité a visiblement intéressé ce lectorat, avide de connaissances, puisque les ouvrages de reportages d’actualité ont bondi de 19 points. 

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Pour Régine Hatchondo, présidente du Centre national du livre, il a pu être difficile pour certains de se "glisser dans l'imaginaire d'un auteur", d'où la hausse des lectures de livres d'actualité et de reportages, "plus que celle des romans qui nécessitent une part de fiction, d'imaginaire"

En conséquence, la lecture plaisir a perdu du terrain puisque 42% des jeunes interrogés ont déclaré lire autant pour leurs loisirs que pour leurs études. 

La porosité entre le lieu de travail et le domicile a joué contre la lecture, notamment en fin d’année. Les Français ayant le sentiment de lire beaucoup pour leur travail ou leurs études, le livre plaisir a moins été au cœur de la vie des Français.                
Régine Hatchondo, la présidente du Centre national du livre dans Les Matins

43 min

Autre spécificité de cette année 2020, les jeunes lecteurs ont témoigné d’un besoin de lecture plus facile. "Quand on va mal et qu’on est fatigué mentalement, il peut être plus facile de se tourner vers les écrans qui prémâchent le travail plutôt que de rentrer dans un livre. Face au sentiment de lire trop, certainement dans le cadre de leurs études, cela les aiderait d’avoir à disposition des lectures plus simples", commente Armelle Vincent Gérard de l'institut de sondage Ipsos. 

Dans cette année où les sorties ont été nettement réduites, la lecture reste un fort moyen d’évasion. C’est la deuxième motivation évoquée par les jeunes, derrière l’approfondissement des connaissances et devant la détente. La lecture reste une activité à laquelle le jeune public s’adonnerait s’il avait une journée de plus dans la semaine pour des loisirs, après sortir avec des amis, ce qui résonne d’autant plus en période de confinement. 

Rue des écoles
59 min

L’exception des confinements

Les confinements sonnent comme des exceptions en matière de lecture pour les jeunes. Car d’après une étude menée par Odoxa pour le Syndicat national de l’édition, publiée en janvier dernier, les jeunes de moins de 25 ans ont déclaré à 42% avoir lu plus de livres lorsqu’ils étaient confinés. Lire pour contrer l’ennui, déconnecter de l’actualité et éviter de rester trop longtemps sur les réseaux sociaux ou internet sont les principales raisons évoquées par les Français, dans leur ensemble, durant le confinement.

Hors confinement, la fermeture des libraires ou rayons librairie des magasins et des bibliothèques, le télétravail et donc le temps moindre passé dans les transports (où la lecture est importante) et le moral en berne n'ont pas encouragé l'activité. 

"Une baisse tendancielle"

Même si la crise sanitaire a joué pour beaucoup dans cette baisse du nombre de lecteurs, le phénomène n’est pas nouveau, en particulier chez les jeunes.

"C’est une baisse tendancielle, constatée depuis une dizaine d’années", affirme Régine Hatchondo. Évidemment, les écrans jouent un rôle important. Les séries, YouTube chez les jeunes, la musique et les vidéos en ligne, les différentes plateformes, les podcasts concurrencent les livres.

Le 28 mars 2012, l’hebdomadaire L’Express interrogeait : "La lecture plaisir serait-elle réservée aux vieux ? 70% des jeunes Français de 15 ans lisaient pour leur plaisir en 2000. Ils n’étaient plus que 61% en 2009, d’après les chiffres figurant dans la dernière étude de l’OCDE sur les performances en lecture des élèves (Pisa 2009)."

Les réseaux sociaux pour attirer les jeunes lecteurs

Pour ramener ces jeunes vers la lecture, qui ont tendance à moins lire à partir de 12-13 ans, le Centre national du livre compte miser sur les réseaux sociaux.

Il y a un désir, notamment des jeunes, d’être pris par la main, d’avoir des clubs de lecture, du partage, des conseils de personnalités connues. Cela nous permet de définir une véritable stratégie numérique et la place du livre sur les réseaux sociaux sera un des axes de réflexion prioritaires.
Régine Hatchondo, la présidente du Centre national du livre

Des vidéos avec des recommandations de lecture, des personnalités qui évoquent leur livre phare sont également des projets du CNL. Des clubs de lecture, en virtuel d'abord et - quand la situation sanitaire le permettra - en physique, seront mis en place pour permettre des échanges entre les jeunes sur les ouvrages lus, appréciés ou non. Des échanges intergénérationnels sont aussi prévus, afin que les aînés "donnent envie aux jeunes de lire des livres qu’ils n’auraient a priori pas envie de lire aujourd’hui", détaille Régine Hatchondo. 

Des enjeux de taille car cela fait plusieurs années déjà que les "booktubers" inspirent le jeune lectorat.

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