Le père de la linguistique générative : épisode • 2/5 du podcast Avoir raison avec... Noam Chomsky

Noam Chomsky dans son bureau du MIT en octobre 1987 ©Getty - Ulf Andersen/Getty Images
Noam Chomsky dans son bureau du MIT en octobre 1987 ©Getty - Ulf Andersen/Getty Images
Noam Chomsky dans son bureau du MIT en octobre 1987 ©Getty - Ulf Andersen/Getty Images
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Refusant les théories comportementalistes qui avaient alors le vent en poupe aux Etats-Unis, Noam Chomsky soutient qu’il existe une structure profonde et universelle à la base du langage humain. Conçue à la naissance de la cybernétique, son approche a un côté « mathématique ».

Avec
  • Pierre Jacob Philosophe du langage et des sciences cognitives, directeur de recherche émérite au CNRS et ancien directeur de l’Institut Jean Nicod.

Tout part d’un émerveillement.

Un tout petit enfant qui n’en est qu’à quelques mois de sa vie sur terre, et de sa découverte du monde, comment peut-il comprendre aussi vite la langue humaine ?

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Et nous adultes, comment pouvons-nous acquérir des systèmes de connaissance aussi étendus, quand notre expérience, elle, est à la fois limitée, et fragmentaire.. ?

Il y a quelque chose de magique à ce que deux humains qui se parlent, se comprennent l’un l’autre. Noam Chomsky n’emploie jamais le mot « d’innéisme », mais c’est bien ce que l’on comprend en le lisant…

Chomsky, dont le père lui-même était linguiste, crée un département de linguistique au MIT dans les années 50. Son premier livre sur le sujet paraît en 1957, Syntactic structures. En France, c’est l’université Paris-8, Vincennes, qui enseignera les principes de sa grammaire dite « générative ».

Et si Noam Chomsky s’est toujours défendu de faire un lien entre son travail sur le langage et ses prises de position militantes, beaucoup chercheront à déceler dans ses théories scientifiques, une explication de sa vision du monde.

"Pour montrer que la taille de l'ensemble des phrases d'une langue n'est pas finie, Chomsky raisonne à peu près de la manière suivante. Prenons un exemple tiré de Syntaxic Structures (1957)  Prenez la phrase qui a été utilisée par Chomsky et que la version française traduit par : "Les idées vertes dorment furieusement". Le choix de cet exemple était destiné à justifier la thèse selon laquelle la grammaticalité d'une phrase doit être distinguée de son sens, puisque celle-ci a un sens très bizarre, très mystérieux. (...) À partir de cette phrase, vous pouvez en former de plus compliquées : "Chomsky a dit que les idées vertes incolores dorment furieusement". C'est aussi une phrase française. Puis "Julie croit que Chomsky a dit que les idées vertes incolores dorment furieusement". Puis "Pierre se demande si Julie croit que Chomsky a dit", etc. Il n'y a pas de limite (...) et c'est une observation qui n'avait jamais été faite avant lui." Pierre Jacob

"Ce qui est particulier dans le travail de Chomsky, c'est qu'il avait connaissance des travaux de la logique mathématique, des mathématiciens, en particulier les logiciens des années 30-40, dont les grands noms sont ceux de Gödel, Alan Turing, Church etc. Des logiciens qui se sont intéressés et qui ont joué un rôle fondamental dans la naissance de l'informatique théorique et de l'intelligence artificielle. Et ce qu'a compris Chomsky, c'est qu'il y a dans ces travaux logiques un concept, le concept de récursivité, qui peut de manière abstraite permettre de comprendre comment un mécanisme fini, dans le cerveau d'un locuteur adulte, peut engendrer un ensemble potentiellement infini de phrases à partir d'un stock fini de mots." Pierre Jacob

"Les travaux formels de Chomsky sur l'organisation hiérarchique arborescente des grammaires des langues humaines, a peu de rapport avec ses travaux sur la manufacture du consentement et sur les procédés grâce auxquels l'idéologie dominante s'impose à la population." Pierre Jacob

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