Plafond de verre et plancher collant : les inégalités professionnelles hommes-femmes

Les inégalités salariales entre hommes et femmes ©Maxppp - Alexandre MARCHI
Les inégalités salariales entre hommes et femmes ©Maxppp - Alexandre MARCHI
Les inégalités salariales entre hommes et femmes ©Maxppp - Alexandre MARCHI
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Depuis une quarantaine d’années, un grand nombre d'indicateurs documentent l’ampleur des inégalités professionnelles femmes-hommes. Comment faire évoluer les choses ? Anita, conseillère commerciale, et Julie, inspectrice du travail, luttent contre les inégalités salariales, chacune à sa manière.

Derrière un écart de rémunération global estimé à 16,5% par Eurostat, les statistiques sur les inégalités professionnelles entre les femmes et les hommes ne disent que peu de choses des inégalités concrètes qui se jouent dans les entreprises et les administrations. Pour certaines femmes, il s'agit de briser le "plafond de verre" qui limite les progressions de carrières. Pour d'autres, ce sera le "plancher collant" qui est devenu synonyme de temps partiels et de bas salaires, des conditions de travail où elles sont surreprésentées. Deux histoires de femmes qui luttent à leurs niveaux respectifs contre les inégalités salariales.

"Ils culpabilisent les femmes qui veulent faire valoir leurs droits"

Anita Pujo est conseillère commerciale au sein d'une agence. Alors qu'elle voit ses collègues hommes évoluer rapidement dans la hiérarchie de l'entreprise, elle continue de stagner au même poste.

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"J'ai postulé à vingt-sept reprises à un poste de catégorie supérieure, sans succès." Anita Pujo

La jeune femme devient responsable syndicale pour faire évoluer cette situation. C'est alors qu'elle se heurte aux discours contradictoires de son employeur en même temps qu'elle découvre l'ampleur des inégalités salariales entre les hommes et les femmes au sein de son entreprise : "On était à quatre cents euros par mois d'écart !"

Indignée par cette inégalité injustifiée, Anita Pujo décide d'assigner l'employeur aux Prud'hommes. Pour elle, "c'est le début de l'enfer", car, dès lors, son directeur d'agence commence à la harceler. 

"Le médecin du travail a fait cinq demandes de changement de poste en huit mois. L'employeur n'a pas donné suite, jusqu'au moment où j'ai été arrêtée." Anita Pujo

Le 25 décembre 2013, Anita fait un AVC "sur pathologie cardiaque avec conditions de travail comme facteur aggravant". Mais qu'importe, elle compte bien aller jusqu'au bout. Et malgré les remarques de ses collègues, elle se démène pour que justice soit faite...

"J'ai entendu un collègue me dire : "Mais tu craches dans la soupe, tu as un salaire, maintenant, en plus tu es cadre ! De quoi te plains-tu ?" Donc en fait, ils amènent les femmes à culpabiliser de faire valoir leurs droits. C'est inacceptable." Anita Pujo

La Bulle économique
4 min

"Mettre un pas dans l'entreprise, c'est entrer dans le monde des hommes"

Inspectrice du travail, Julie s'est intéressée plus particulièrement à la place des femmes dans l'histoire du droit du travail. Elle comprend rapidement que, pour une femme, "mettre un pas dans l'entreprise, c'est entrer dans le monde des hommes".

L'inspectrice repère au sein des entreprises les mécanismes discriminants et les injustices dans les conditions de travail. Pour cela, elle rencontre les employés, mène des entretiens, consulte les fiches de postes et les bulletins de salaire, pour prendre la mesure exacte des discriminations sexistes. Un jour, la salariée d'une entreprise agro-alimentaire la contacte.

"Elle est arrêtée pour des raisons de maternité. Et quand elle reprend le travail, le salarié dont elle était la cheffe est devenu son chef. Elle n'a plus accès à l'intranet de l'entreprise, ou tout simplement, elle n'a plus accès à un ordinateur. Elle n'a plus accès à son bureau." Julie

Julie découvre alors que la loi prévoit une obligation liée au retour de congé maternité. Quand les femmes sont absentes pendant les périodes d'augmentation collective et individuelle en entreprise, elles doivent pouvoir en bénéficier aussi à leur retour. C'est ce qu'on appelle le principe de rattrapage salarial.

La jeune inspectrice décide donc de réaliser une série de contrôles dans les entreprises de la région pour vérifier que cette obligation est bien respectée…

"Quand j'explique à la DRH le principe de rattrapage salarial, je la vois blêmir et se dire : "Ohlalala, ça va être le bordel..."" Julie

Merci à Anita Pujo, Julie, et une pensée pour Me Emmanuelle Boussard-Verrechia.

Reportage : Judith Chetrit

Réalisation : Anne Depelchin

Mixage : Valérie Lavallart et Eric Boisset

Musiques : "Wave" de Rone et "Blow Up" de The Beaches.

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