1936 : Keynes, "Théorie générale de l’emploi" : épisode • 26/30 du podcast Comment les livres changent le monde

John Maynard Keynes, le 16 mars 1940 ©Getty - Tim Gidal
John Maynard Keynes, le 16 mars 1940 ©Getty - Tim Gidal
John Maynard Keynes, le 16 mars 1940 ©Getty - Tim Gidal
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Cet essai de science économique est un des traités qui a le plus influencé la manière de penser les économies de marché et leur rôle dans le champ politique.

Avec
  • Christophe Ramaux Économiste, chercheur au Centre d’Economie de la Sorbonne (Université Paris 1), membre des Economistes atterrés
  • Annick Steta Docteur en économie et chercheuse à l'Université de Lorraine

Qui est John Maynard Keynes ?

John Maynard Keynes, né en 1883, vit en Angleterre dans une famille de la bourgeoisie. Particulièrement doué pour les mathématiques, il intègre le King’s College de Cambridge puis se réoriente vers des études d'économie. À cette époque, il est aussi membre du groupe de Bloomsbury, fondé par Virginia Woolf, sa sœur et son frère dont la liberté, même sexuelle, séduit nombre de figures intellectuelles. Dans ces milieux élitistes, il peut être ouvertement homosexuel avant d’épouser en 1925 une ballerine russe Lydia Lopokva.

Il rédige ses premiers textes économiques après la Première Guerre mondiale et sera un des derniers économistes à l’écriture littéraire avec des qualités de polémiste qui feront sa réputation. Reconnu, il conseillera plusieurs ministres. Il est aussi "un ami des arts" selon la formule de Régis Debray.

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Un essai qui fait rupture ?

Celui qui rêvait d’être artiste, rédige La Théorie générale de l’emploi en 1936. Ce livre utilise l’apport d’auteurs qui l’ont précédé. Il fait l’objet d’une relecture attentive et critique de plusieurs de ses proches.

"La Théorie générale n’est pas une pure invention de Keynes mais beaucoup de raboutages de ce qui existaient par ailleurs" Annick Steta

Dans cet ouvrage, Keynes s’oppose à la conception classique du laisser-faire en matière d’économie qui ne parvient à résoudre ni le sous-emploi, ni l’inégalité. Keynes, en cherchant à remédier à deux grands maux, la récession et le chômage, ouvre la voie à une nouvelle école de pensée.

Keynes travaille, selon Christophe Rameaux, à une troisième voie qui échapperait à l’alternative entre libéralisme et socialisme étatique. Il prend appui sur la sociologie et la psychologie afin d’analyser les besoins des acteurs économiques ; et défend la nécessité d’une régulation par l’État dans le but de pallier aux variations des marchés et viser le plein emploi. Il écrit : "J’introduis l’État, j’abandonne le laisser faire".

Quels sont les effets de sa théorie ?

Au cours du temps, l’importante portée politique de sa théorie a été gommée pour la réduire à des formules qui en occultent les nuances.

"La première leçon de Keynes n’est-ce pas que l’économie est toujours l’incertitude comme la vie, difficile, comme chacun sait, à mettre en équation." Régis Debray

Mais, la pensée keynésienne est remise sur le devant de la scène à chaque nouvelle crise qui secoue le néolibéralisme en mettent en doute sa viabilité à long terme. Prise dans son ensemble, elle permet, selon Christophe Ramaux, de remettre sur la table les questionnements concernant le fonctionnement de la démocratie et la nécessité de remettre de la politique dans les enjeux économiques pour faire émerger une économie "républicaine" de services publics à l’inverse des théories libérales.

Bibliographie indicative

  • John Keynes, Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie, Éditions Payot
  • Christophe Ramaux, Pour une économie républicaine, Deboeck, 2022
  • Pascal Combenale, Introduction à Keynes, La Découverte, 2010
  • Bernard Maris, Keynes ou l'économiste citoyen, Les Presses de Sciences Po, 2007
  • Marc Lavoie, Virginie Monvoisin et Jean-François Ponsot, L’économie post-keynésienne, La Découverte, 2021

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