Le temps des héroïnes

Reine Prat, autrice des rapports ministériels de 2006 et 2009 sur les inégalités dans les arts du spectacle, décide douze ans plus tard d’écrire à nouveau : Exploser le plafond. Précis de féminisme à l'usage du monde de la culture aux éditions Rue de l'échiquier (2021). Pour Reine Prat, il faut se défaire de l'idée de laisser le temps au temps : "Je ne crois pas que les choses changent dans le temps. Je crois que le temps des héroïnes c’est un peu comme le messie, on nous l’annonce depuis la nuit des temps et on n'y est jamais. Par contre il y a des moments où il se passe des choses qui font que l’on respire un peu mieux". Consciente que ses rapports ont permis aux femmes de s’affirmer et de se légitimer dans le monde de la culture, elle encourage la lutte permanente pour une égalité entre les citoyens.

Anne Théron : explorer le cri intérieur des femmes

Artiste associée au Théâtre National de Strasbourg, metteuse en scène, autrice et cinéaste, Anne Théron explore à travers son art le cri intérieur des femmes. En 2015, elle écrit Ne me touchez pas d'après les Liaisons dangereuses de Pierre Choderlos de Laclos, sur lequel elle pose un regard de femme sur le libertinage et ses enjeux. Du 7 au 13 juillet à l’Opéra Grand Avignon, elle met en scène la pièce  Iphigénie, d’après un texte de Tiago Rodrigues, dans laquelle les personnages féminins retrouvent une place inédite. Dans cette version moderne de la tragédie grecque, les femmes ont leurs destins en main, explique Anne Théron : "Iphigénie va mourir certes, mais elle ne meurt pas de la même manière, et ça change tout. C'est une jeune femme qui revendique son corps, ce qu’elle dit, et ce qui est fondamental, c’est 'non, je vais mourir, vous allez m’oublier et nous n'allons pas répéter ce même cycle.'"

Agnès Desarthe : questionner la place du désir chez Anaïs Nin

Librement inspirée des nouvelles fantastiques et des Journaux d’Anaïs Nin, Agnès Desarthe met à l’honneur l’une des premières femmes ayant écrit des œuvres érotiques dans sa pièce Anaïs Nin au miroir mise en scène par Élise Vigier du 9 au 16 juillet au Théâtre Benoît-XII. Elle offre un regard personnel et original sur l’écrivaine franco-américaine, incarnée par six comédiens différents, trois hommes et trois femmes. Une figure féminine mais pas forcément féministe pour Agnès Desarthe : "Pour moi (Anaïs Nin) n’est pas une figure du féminisme, je ne l’ai jamais perçue comme ça. Pour moi c’est quelqu’un qui vivait beaucoup dans le regard des hommes, mais elle le faisait avec beaucoup d’audace et de liberté. Ce qui nous intéressait c’était plutôt la place du désir chez elle, c’est ça qui en fait une sorte d'héroïne moderne, elle place son désir au cœur de sa vie".

À lire aussi : Anaïs Nin, écrire l'intime

Pour aller plus loin

• Retrouvez Reine Prat le 14 juillet à 18h30 au Théâtre des Doms dans le spectacle  États du monde : Les chroniques de Valérie Cordy accompagnée par la journaliste Charline Cauchie
• Anaïs Nin au miroir d'Agnès Desarthe, mise en scène par Élise Vigier, du 9 au 16 juillet au Théâtre Benoît-XII
• Iphigénie de Tiago Rodrigues, mise en scène par Anne Théron, du 7 au 13 juillet à l’Opéra Grand Avignon

Extraits sonores :

• Deborah Levy sur France Culture dans l'émission La Grande Table, Octobre 2021
• Extrait d'Anaïs Nin au miroir, Agnès Desarthe, Festival d'Avignon 2022
• Extrait d'Iphigénie - prologue - Tiago Rodrigues et Anne Théron, Festival d'Avignon 2022
• Extrait d'Iphigénie - scène 5 - Tiago Rodrigues et Anne Théron, Festival d'Avignon 2022
• Interview de Denis Lavant