Energies renouvelables en France : ce qui marche, ce qui bloque

Des éoliennes dans un champs à Conlie près du Mans, le 9 juillet 2020. ©AFP - Jean-Francois MONIER
Des éoliennes dans un champs à Conlie près du Mans, le 9 juillet 2020. ©AFP - Jean-Francois MONIER
Des éoliennes dans un champs à Conlie près du Mans, le 9 juillet 2020. ©AFP - Jean-Francois MONIER
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Pour atteindre la neutralité climatique d’ici 2050, la France cherche à augmenter sa production d’énergie renouvelable. Mais à des résultats inférieurs aux objectifs fixés par l'Etat s'ajoute la multiplication des oppositions à l'installation d'infrastructures dont dépend la transition.

Avec
  • François Bost Professeur à l’Université Reims Champagne Ardennes. Président de l’association Magie, Histoire et Collections (MHC)
  • Chantal Jouanno Senior advisor au cabinet Accenture, ancienne présidente de la commission nationale du débat public, ancienne ministre

En début d'année, le manquement par la France de ses objectifs pour déployer des capacités d'énergie renouvelable faisait la Une des journaux. Plus récemment, le 28 juillet, le gouvernement a annoncé des mesures d'urgence pour faciliter leur déploiement, alors que le prix des matériaux flambe. Écourter les délais de procédure, autoriser une montée en puissance de projets déjà approuvés, lancer de nouveaux appels d'offre, ces mesures sont-elles suffisantes alors que les oppositions contre les nouveaux projets se multiplient ?

Pour voir comment se déclinent les projets de renouvelables au local et comment ils tiennent compte des aspirations citoyennes, les Matins accueillent Chantal Jouanno, présidente de la Commission Nationale du Débat Public, ancienne secrétaire d'Etat chargée de l'Ecologie, et François Bost, professeur de géographie économique et industrielle à l'université de Reims Champagne-Ardenne.

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Le principe de la transition énergétique accepté, sa méthode remise en question

La Commission Nationale du Débat Public (CNDP) organise des débats et des consultations publiques à travers la France sur des projets d'infrastructure qui ont un impact sur l'environnement. Pour sa présidente Chantal Jouanno, "il y a eu une évolution assez profonde dans les débats publics. On a fait seize débats sur les parcs éoliens en mer, mais on fait aussi l'éolien terrestre ou les panneaux solaires au sol. Ce qui a profondément changé, c'est que depuis deux, trois ans, le principe de la transition énergétique n'est plus du tout contesté."

Le public demande surtout de la transparence autour des projets portés par les collectivités et une meilleure visibilité sur les projets futurs. "On veut savoir, à quoi va ressembler notre paysage demain [...] on ne veut pas que notre territoire soit couvert de projets, que les autres territoires ne contribuent pas à l'effort national," renchérit Chantal Jouanno.

Si les débats sont surtout menés à l'échelle territoriale, c'est aussi parce que les projets sont portés localement et que leurs répercussions en termes d'emploi ou de prix de l'énergie intéressent les résidents. La question de la rentabilité au niveau local est "souvent la moins argumentée, la moins crédible. Quand les porteurs de projet disent, ça va créer tant d'emplois, systématiquement le public doute de ces chiffres. D'ailleurs, c'est le sujet sur lequel on nous demande le plus d'expertises, c'est-à-dire des contre-expertises sur le nombre d'emplois générés par le projet." - Chantal Jouanno

L'éolien au centre des débats

Pour François Bost, l'énergie éolienne cristallise le débat sur les renouvelables depuis plusieurs années, alors que les parcs éoliens ont commencé à voir le jour il y a vingt ans et se dénombrent aujourd'hui à 1350. "Il y a à peu près 8 500 mats d'éoliennes en France, donc ça se voit dans le paysage." La visibilité de l'éolien explique les débats qu'il génère dans le monde rural, et notamment dans le cadre de la campagne présidentielle à l'initiative du Rassemblement National.

Une étude publiée cette semaine dénombre en première le nombre de mats d'éoliennes en France. Elle met en évidence la fracture territoriale en terme de parcs éoliens : les Hauts de France (1863 éoliennes) et le Grand Est (1846 éoliennes) arrivent largement en tête, en raison des forts vents d'ouest qui les traversent. Néanmoins, d'autres régions comme celle du Rhône seraient également adaptées à l'énergie éolienne mais ne sont pas exploitées.

Des projets plus soucieux des intérêts locaux

Pour François Bost, "un projet réussi, c'est un projet qui part sur de bonnes bases, qui est compris. Ça ne sert à rien de cacher les conséquences de nouveaux parcs d'activité. Et puis surtout faire comprendre aux populations qu'elles ont des attentes légitimes et que ça va participer à la transformation positive des territoires."

L'énergie solaire, moins visible et inaudible, rentable, s'étend aujourd'hui à bas bruit à travers la France, malgré des dépendances en raison des matières premières utilisées dans la production de panneaux photovoltaïques. Notamment, "le développement de l'agrivoltaïsme associe en un même lieu l'agriculture et la production d'énergie et l'agriculture par une technique éprouvée de surélevation des panneaux solaires à quatre mètres pour laisser passer les troupeaux. Et là, les agriculteurs sont demandeurs, parce qu'ils y voient un complément de revenu, les revenus des agriculteurs sont en baisse et à un moment où on va vers une révision de la Politique Agricole Commune qui va priver la France d'un milliard d'euros de subventions." - François Bost

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