Clinton : “It’s the economy, stupid” : épisode • 2/3 du podcast L’éco en trois punchlines

Bill Clinton lors d'un rassemblement électoral ©Getty - Peter Turnley/Corbis/VCG via Getty Images
Bill Clinton lors d'un rassemblement électoral ©Getty - Peter Turnley/Corbis/VCG via Getty Images
Bill Clinton lors d'un rassemblement électoral ©Getty - Peter Turnley/Corbis/VCG via Getty Images
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En quoi ce slogan, entré dans l’histoire, est-il emblématique des années Clinton ? Comment le démarque-t-il politiquement et économiquement ?

Avec
  • Tamara Boussac Historienne, maîtresse de conférence en études nord-américaine à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
  • Jean-Baptiste Velut Professeur des universités à la Sorbonne Nouvelle

L'économie est encore aujourd’hui un thème central pour les électeurs américains. Lors des dernières élections, un sondage du Pew Research Center publié le 13 août 2020 estimait que 80% des Américains classaient l’économie avant tout autre sujet, devant la santé, et même la Cour suprême. Parmi les plus lucides qui ont saisi l’importance des thématiques économiques dans les campagnes présidentielles, le conseiller de Bill Clinton en 1992, James Carville, avec son slogan “It’s the economy, stupid”, que l'on pourrait traduire comme "C'est l'économie qui compte, idiot". Faire le pari de l’économie, une stratégie gagnante pour vaincre dans les urnes ? Stratégie qui s’avère en tout cas efficace pour Bill Clinton, qui l’emporte par deux fois, en 1992 et 1996, et gouverne le pays huit ans durant.

Ce slogan est également celui d’un courant politique, une nouvelle génération de démocrates, prônant une “troisième voie” entre le tout-État et le tout-marché et remettant en cause le système d’Etat-providence hérité de Roosevelt. A la tête de ces Nouveaux Démocrates, Bill Clinton, résolument libéral dans le sens économique plus qu’américain du terme, prône le libre-échange et la dérégulation des marchés. Ses années de présidence seront celles d’une politique commerciale agressive de libéralisation compétitive et de la financiarisation de l’économie américaine.

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La rhétorique économique pour rompre aussi bien avec la récession qu’avec la politique telle qu’elle existe

Les Etats-Unis entrent en juillet 1990 en récession, mettant fin à la plus grande période d’expansion économique que le pays ait connu. Ce ralentissement économique s’amorce avec le krach boursier d’octobre 1987 et la crise des Savings and loan, la guerre du Golfe et la flambée des prix du pétrole qui s'ensuit finissent de faire entrer le pays dans la récession. Tamara Boussac le précise "la question de l'équilibre budgétaire et de la prudence fiscale est fondamentale dans les nouvelles orientations du parti démocrate. C'est en rupture avec certaines politiques menées dans les années 80, notamment les baisses d'impôts et l'explosion des dépenses militaires, décidées pendant la présidence Reagan, ce qui a creusé le déficit et impacté les finances publiques. Par ailleurs, il s'agit de remettre les classes moyennes au centre de la politique, celles-ci ont été oubliées des programmes sociaux et de la politique fiscale des Républicains". Jean-Baptiste Velut ajoute "la dimension sociale de la politique de Clinton a été oubliée car aujourd'hui il reste associé à la trahison de la classe ouvrière. Mais il faut se rappeler la réforme de la santé, certes avortée, l'augmentation des impôts sur les plus riches, on peut aussi évoquer le projet d'infrastructures".

La politique économique de Clinton en pratique : un modèle économique de plus en plus ambigu

Clinton prend les rênes du pays en plein moment unipolaire : avec la fin de la Guerre Froide et la chute du Mur de Berlin, les Etats-Unis se retrouvent en hégémonie sur le plan des affaires internationales. Il organise alors la résurgence de la diplomatie économique. Jean-Baptiste Velut le confirme "c'est une décennie de la mondialisation qui va bénéficier à l'économie intérieure des Etats-Unis. Avec les accords de libre-échange, la politique de libération menée au FMI et à la Banque mondiale, dont les Etats-Unis font pleinement bénéficier".

Pendant sa compagne de 1992, Bill Clinton avait promis de mettre fin au système d'assistance et d'aide sociales. Tamara Boussac détaille ce point "la question de l'aide sociale est une question politique majeure dans la deuxième partie du XXème siècle. Il s'agit d'un programme créé en 1935 pendant le New Deal, qui vient en aide aux femmes seules, qui ont des enfants à charge. Ce programme est progressivement décrié. Dans les années 90, il y a deux critiques principales : l'aide sociale détourne de l'emploi et ce programme détournerait du mariage".

Références sonores :

  • Daniel Cohen sur le Glass-Steagall Act, France Inter, 2011
  • [Discours de Bill Clinton](https://www.youtube.com/watch?v=cm-UAf EdW g4) lors du troisième débat entre les candidats à l’élection présidentielle de 1992
  • Michel Besson, ancien attaché commercial à l’Ambassade de France - “Demain l’Amérique”, Rue des entrepreneurs, France Inter, 1996
  • Témoignages extrait d’un reportage de 1999 dans le Wisconsin
  • Générique Les Experts Miami

Références musicales :

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