Et maintenant ? Ce que le féminisme fait à l'économie

En France, entre 1998 et 2015, l’écart de patrimoine entre les femmes et les hommes est passé de 9 % à 16 %. Il a quasiment doublé. Un chiffre qui peut étonner alors que les inégalités femmes/hommes font de plus en plus l’objet d'une prise de conscience et d’instauration de politiques de réduction de ces inégalités. Mais si ces dernières perdurent, c’est aussi qu’elles sont le résultat de mécanismes moins visibles, liés à des stéréotypes tenaces, qu’il est plus difficile d’identifier et donc de contrecarrer. D’autant que l’argent est aussi un sujet tabou en soi, qu’il serait malvenu de mettre sur la table dans le cadre du couple, où sentiments et questions matérielles ne semblent pas faire bon ménage. Alors comment les femmes peuvent-elles reprendre le contrôle des cordons de leurs bourses ? Si les obstacles institutionnels et légaux sont de moins en moins nombreux, il ne faut pas oublier que la situation actuelle est le résultat d’une lutte politique qui perdure aujourd’hui. Surtout, identifier les biais de genre là où ne les attend pas forcément, les exposer dans le débat public peut permettre de lutter contre un appauvrissement des femmes qui ne dit pas son nom.

La place des femmes dans l’économie : un impensé tenace

Les femmes souffrent d'une invisibilisation spécifique de leur condition économique. Leur travail est bien souvent non reconnu, en particulier celui dans la sphère domestique. Titiou Lecoq souligne que c'est également le cas des métiers du care : "ce sont les emplois les moins bien payés, occupés par des femmes notamment car l'on considère qu'une aide soignante, une infirmière, une gardienne d'enfants, ce sont des personnes qui n'ont pas de compétences spécifiques acquises par un diplôme, mais on considère que c'est un peu l'expression de leurs qualités personnelles de femme, de leur genre." La société bénéficie du travail gratuit des femmes, mais à l'inverse, les comportements asociaux, majoritairement le fait des hommes, représentent un coût conséquent supporté par la société. Lucile Peytavin précise :"il y a des dépenses en terme de frais de justice, de force de l'ordre, de services de santé et des coûts indirects qui sont supportés par la société, parce qu'il y a des victimes et des souffrances psychologiques, des destructions de biens, des pertes de productivité et tout cela peut se calculer."

Le couple, un gouffre financier pour les femmes ?

Les femmes payent bien souvent les dépenses du quotidien quand les hommes arrivent à se constituer un patrimoine.  De plus, Léa Lejeune souligne que "la parentalité pèse sur les épaules des femmes, elles assurent encore 70 à 80% des tâches parentales et ménagères ce qui a un impact important sur leurs revenus". Titiou Lecoq explique qu'il existe des solutions : "quand on a le plus petit revenu, on a intérêt à se faire une épargne, en tout cas une sécurité économique, donc d'aller insister pour prendre en charge 20% du crédit immobilier, de la voiture, pour qu'il me reste quelque chose en cas de séparation."

Références sonores

• Archive INA, 1967 : la journaliste Danièle Breem interroge le notaire Henri Collette
• Extrait de « Femmes au foyer : le réveil brutal », Les Pieds sur Terre, France Culture, 17 octobre 2022
• Micro-trottoir sur la gestion de l’argent dans le couple, France 2, décembre 2021
• Extrait du film film 9 to 5, par Colin Higgins, 1980

Références musicales

• « 9 to 5 », Dolly Parton (extrait de la bande-originale du film 9 to 5 de Colin Higgins, réalisé en 1980)
• «  Everyone heals », Blumi

Bibliographie

Le média "Plan Cash" co-fondé par Léa Lejeune, à retrouver ici : https://plancash.fr/

Titiou Lecoq, Le couple et l'argent - Pourquoi les hommes sont plus riches que les femmes, éditions L’iconoclaste, 2022.

Lucile Peytavin, Le coût de la virilité. Ce que la France économiserait si les hommes se comportaient comme les femme, 
Anne Carriere Eds, 2021.

Léa Lejeune, Féminisme Washing - Quand les entreprises récupèrent la cause des femmes, Seuil, 2021