La découverte des atomes, une affaire de fleurs

"Clarkia pulchella" (Clearwater National Forest, Idaho). - Auteur inconnu - source Wikipédia
"Clarkia pulchella" (Clearwater National Forest, Idaho). - Auteur inconnu - source Wikipédia
"Clarkia pulchella" (Clearwater National Forest, Idaho). - Auteur inconnu - source Wikipédia
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Quand tout est parti de grains de pollen trempés dans l'eau.

Aujourd’hui, nous le savons tous : la matière est faite d’atomes. Mais, au tout début du XXe siècle, l’atome n’avait pas été détecté, encore moins observé. Les physiciens se répartissaient donc en deux camps : d’un côté, ceux qui "croyaient" à son existence, de l’autre ceux qui n’y croyaient pas.

Albert Einstein appartenait au premier camp. Un jour, il eut la bonne idée de se pencher sur un phénomène étudié plus de soixante-dix ans plus tôt par un certain Robert Brown** : en 1827, ce botaniste écossais observa au microscope les grains de pollen d’une fleur sauvage portant ce joli nom de Clarkia pulchella, qu’il avait placés dans l’eau. Il remarqua avec étonnement l’agitation erratique et permanente de ces grains de pollen en suspension. Quel pouvait être l’inusable moteur de cette folle sarabande ? Brown fit de multiples observations et découvrit que, loin d’être réservé aux seuls grains de pollen, ce "mouvement brownien" se manifestait pour toutes sortes de petites particules, y compris minérales. Il se produit en fait chaque fois que des particules inanimées se trouvent en suspension dans de l’eau ou au sein d’un gaz : plus ces particules sont grosses, plus le mouvement est lent ; plus la température du liquide est élevée, plus il est rapide.

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Einstein eut l’intuition que, loin d’être de simples caprices, ces déplacements erratiques et incessants reflètent un ordre sous-jacent : ils seraient déterminés par l’agitation de corps invisibles – les molécules d’eau. Innombrables et minuscules, ce sont elles qui heurtent frénétiquement les particules en suspension, les obligeant à changer sans cesse de direction. Ces particules seraient en somme le relais entre deux mondes : le monde visible et le monde invisible. Si leur grandeur permet qu’on les observe grâce à un microscope, leur petitesse les rend sensibles aux chocs des molécules individuelles qui dévient leur trajectoire. Que la particule immergée soit suffisamment grosse (par exemple, un morceau d’aiguille de pin), et les très nombreux chocs qui se produisent dans toutes les directions s’équilibrent ; leur résultante est quasi nulle et ne provoque donc aucun mouvement. Mais en revanche, si elle est très petite , les chocs qu’elle subit, beaucoup moins nombreux, ne peuvent se compenser totalement sur un temps donné. En permanence, leur résultante est non nulle, fluctuante, provoquant un déplacement visible de la particule, un déplacement en zigzag.

Le 11 mai 1905, Einstein adressait à Annalen der Physik un article qu’il intitula de manière anodine, "Sur le mouvement de particules en suspension dans un fluide au repos impliqué par la théorie cinétique moléculaire de la chaleur". Rien n’indiquait qu’il y fût question de l’atome. Sans avoir l’air d’y toucher, il provoqua pourtant un véritable basculement dans l’histoire des sciences.  (...).

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