Face aux extinctions, repenser la préservation la biodiversité

Un orang-outan dans la station de recherche Soraya en Indonésie, le 20 juin 2020. ©AFP - Chaideer Mahyuddin
Un orang-outan dans la station de recherche Soraya en Indonésie, le 20 juin 2020. ©AFP - Chaideer Mahyuddin
Un orang-outan dans la station de recherche Soraya en Indonésie, le 20 juin 2020. ©AFP - Chaideer Mahyuddin
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Ce sont des termes qui résonnent de plus en plus dans l'actualité : érosion de biodiversité, disparition des espèces, voir sixième extinction de masse. Mais comment analyser l’ampleur et les causes du phénomène, et surtout lutter contre ce déclin des espèces naturelles ?

Avec
  • Gilles Bœuf Biologiste, professeur à Sorbonne Université, président du Centre d’études et d’expertise en biomimétisme (CEEBIOS) et professeur invité au Collège de France.

Selon Gilles Bœuf, nous assistons à un effondrement du nombre d'individus dans les populations sauvages, tous groupes confondus. "On avait calculé les taux d'extinction naturels sur les 60 dernières millions d'années. On constate qu'il évolue entre 100 et 1000 fois plus vite avec la présence humaine", explique le biologiste.

Les causes anthropiques du déclin des espèces sauvages

Parmi les causes de cette accélération vient d'abord "la destruction pure et simple de la nature et des écosystèmes" par l'activité humaine. Viennent ensuite les contaminations interespèces, la pollution par la présence de plastique, de perturbateurs endocriniens ou de métaux lourds." Avec une multiplication par dix de la pollution plastique depuis 1980. C’est aussi "la surexploitation, la surpêche, le surenlèvement des arbres dans la forêt par exemple".

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Autre cause de destruction des milieux naturels par l'homme : la dissémination. "Dans les îles, c'est une vraie catastrophe" observe Gilles Bœuf. L'arrivée du lapin, du rat, bouleverse les écosystèmes locaux avec l'arrivée de ces espèces invasives, souvent favorisée par nos activités. Enfin, le réchauffement climatique crée par les activités des économies carbonées favorise le déclin de la biodiversité.

Inaction collective

Gilles Bœuf regrette l’inaction collective face au déclins des espèces : "pour l'instant on en parle, on ne met pas les moyens. Où sont les 1000 milliards de dollars qu'on avait promis aux peuples africains lors de la COP21 à Paris ? Ils n'ont jamais rien touché du tout. […] Les scientifiques, les politiques, les ONG et les citoyens, on en parle, mais aussi le monde de l'entreprise. Il faut que le monde de l'entreprise s'empare de cela. […] Et là, si tout le monde travaille de la même façon en comprenant que si on ne fait pas ça de façon collective, on aura du mal à s'en sortir. Je ne suis pas un collapsologue, mais ils auront raison si on ne fait rien. Il faut qu'on change.

Repenser notre rapport au vivant

Nadir Alvarez, professeur de biologie et directeur du Museum des Sciences naturelles de l'État de Vaud (Lausanne), insiste sur l'importance de ne pas oublier les espèces éteintes. "Quand on oublie un pan d'histoire, finalement, on refait les mêmes erreurs." Car la mémoire collective a un rôle à jouer dans la protection des espèces, dans la mesure où elle influe sur nos représentations, plus ou moins négatives, de ces populations. "On est quelque part confronté à ça avec le loup ou l'ours, qui reviennent dans nos contrées. Souvent ces animaux sont associés avec une histoire qui n'était pas très positive."

Pour le biologiste, il faut associer histoire et sciences pour repenser l'imaginaire collectif autour des espèces sauvages. "Par rapport au loup, au lynx et à l'ours, il y a rien de tel que peut être de se servir de cette histoire orale tout en y ajoutant un peu de science. Parce que finalement, on sait qu'aujourd'hui les attaques de loups sont rarissimes sur les humains, qu'on peut aussi trouver des moyens de sensibiliser à de bonnes pratiques pastorales pour limiter les attaques."

Mécaniques du vivant
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