Politique : rentrée à haut risque pour le gouvernement

L'Assemblée nationale sera le lieu d'âpres débats dans les prochaines semaines et les prochains mois avec les nouvelles réformes qui se préparent. ©Getty - Tim Graham
L'Assemblée nationale sera le lieu d'âpres débats dans les prochaines semaines et les prochains mois avec les nouvelles réformes qui se préparent. ©Getty - Tim Graham
L'Assemblée nationale sera le lieu d'âpres débats dans les prochaines semaines et les prochains mois avec les nouvelles réformes qui se préparent. ©Getty - Tim Graham
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Retraites, chômage, énergie, immigration... La rentrée politique s'annonce chargée pour le gouvernement. Comment les différentes réformes seront-elles menées de front ?

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Réforme des retraites : l'appareil politique déconnecté des réalités

Parmi les nombreux dossiers de ce début d'année 2023, la réforme des retraites est omniprésente dans le débat public. Bruno Cautrès constate "l'écart entre la vision macroscopique de cette réforme par la politique et ce que vont vivre les gens de manière individuelle." Le politiste met en avant qu'Elisabeth Borne peine à "donner sens à ce projet de réforme", alors même que les enquêtes menées par le Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof) font apparaître "le sentiment qu'ont de nombreux Français et Françaises, à savoir que la politique s'exonère assez régulièrement de règles qu'il applique aux autres". Une incompréhension renforcée par le débat qui s'installe autour de "la question de la juste rémunération du travail et des efforts que l'on a fait dans la vie", estime le chercheur, avant d'ajouter que "travailler plus longtemps pour finir avec une retraite d'un niveau assez modéré n'est pas un projet de société extrêmement motivant."

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Mardi 03 janvier 2023, au micro de Marc Fauvelle et Salhia Brakhlia, la Première ministre, a affirmé que le report de l’âge légal de départ en retraite à 65 ans, n’était pas un « totem ». Pour Bruno Cautrès, cette déclaration qui "accentue le sentiment de confusion. Si ce n'est pas un totem, pourquoi s'y accrocher ?". D'autant plus que le politiste est formel, "l'exécutif ira jusqu'au bout."

Négociations sur les retraites : une parodie de dialogue social ?

La déclaration d'Elisabeth Borne est une main tendue vers les Républicains, c'est pour eux "l*'heure de vérité*" affirme Bruno Cautrès : "s*'ils votent ce projet de réforme à l'Assemblée nationale, ils basculeront de facto dans la majorité présidentielle parce qu'il s'agit d'un dossier emblématique, très important dans l'opinion et très discuté dans l'espace public*. À l'inverse s'ils ne le votent pas, ils apparaîtront en contradiction avec les propositions qu'ils ont faites, y compris pendant la campagne présidentielle".

Dans ce contexte, le dialogue avec les syndicats apparaît inutile voire factice. Bruno Cautrès considère que "comme toujours lorsque l'exécutif consulte et reçoit les partenaires sociaux ou les responsables de partis politiques, c'est un jeu à double facette. Lorsque le Premier ministre reçoit des leaders de formations politiques c'est bien évidemment dans le but de dialoguer et d'essayer d'avancer vers des solutions partagées." Mais il ne faut pas être naïf, "l*'exécutif souhaite aller jusqu'au bout de l'idée d'augmenter la durée de cotisation et de repousser l'âge légal de départ à la retraite*" insiste-t-il.

Pour Stéphane Alliès, la récente colère des boulangers permet de faire le constat intéressant que "la politique passe maintenant sous le radar des syndicats et des partis. On l'a vu sur la grève SNCFLa contestation s'autoorganise de plus en plus depuis le mouvement Gilets jaunes." Le journaliste affirme que c'est tout le "champ traditionnel classique politico-syndical de gauche comme de droite" qui est mis en danger : "à force de taper sur les corps intermédiaires en permanence, depuis maintenant quinze ans, on se retrouve dans une société où tout peut s'enflammer puisqu'il n'y a plus de médiation ni d'intermédiation pour faire de la politique au sens noble du terme."

Rentrée politique sous tension : un nouveau défi pour la gauche ?

Le baromètre réalisé chaque année par le Cevipof met en lumière une crise de confiance majeure selon Bruno Cautrès : "les partis politiques sont placés systématiquement en bas du tableau, en dernier, dans l'ordre de la confiance des Français, quelque part entre 18 et 20% pour une bonne année, et 12 et 15% le reste du temps."

À gauche de l'échiquier politique, "il y a un gros problème de représentativité" alerte Stéphane Alliès. Il déplore notamment qu'"à force de vouloir faire disparaître les partis", certains apparaissent désormais davantage comme des groupuscules désorganisés : "la France insoumise par exemple, avec sa volonté d'être un mouvement gazeux en permanence, ne fait que créer de l'insécurité militante. Il n'y a pas de procédures, par exemple pour savoir vers qui se tourner quand on est victime - ou prétendument victime - de violences sexuelles ou quand il s'agit de désigner un nouveau chef ou un porte-parole du parti".

S'il y a "toujours eu des dissensions internes dans les mouvements mélenchoniens, ce qui est vraiment nouveau, c'est que cette fois, on commence à voir émerger les critiques de fidèles de longue date. Cela révèle ainsi des tensions sur l'avenir du parti et de l'union de la gauche" développe le journaliste. "Les retraites ne doivent pas forcément être l'alpha et l'oméga de la gauche en ce moment" estime Stéphane Alliès : "pour la gauche sociale se pose aujourd'hui la question salariale de ré-indexation des salaires sur l'inflation, qui anime toutes les entreprises en grève. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas se mobiliser sur les retraites, mais la gauche politique doit arriver à tenir une position globale, cela doit être son rôle auprès des syndicats."

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