Fratelli d’Italia et le fascisme : un aggiornamento inachevé : épisode • 2/4 du podcast Partis d’extrême droite : une certaine idée de l’Histoire

Giorgia Meloni remercie ses soutiens lors d'un discours au siège de Fratelli d'Italia juste après sa victoire aux élections législatives, Rome, le 26/09/22 ©AFP - Andreas Solaro
Giorgia Meloni remercie ses soutiens lors d'un discours au siège de Fratelli d'Italia juste après sa victoire aux élections législatives, Rome, le 26/09/22 ©AFP - Andreas Solaro
Giorgia Meloni remercie ses soutiens lors d'un discours au siège de Fratelli d'Italia juste après sa victoire aux élections législatives, Rome, le 26/09/22 ©AFP - Andreas Solaro
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En septembre 2022, la coalition de droite et extrême-droite italienne remporte les élections législatives. La nouvelle Première Ministre, Giorgia Meloni, fondatrice du Parti Fratelli d'Italia, entretient un rapport ambigu à la période fasciste, qu'elle avait pourtant qualifié de "mal absolu".

Avec
  • Stefanie Prezioso Professeure d’histoire contemporaine et à l’université de Lausanne
  • Marc Lazar Professeur émérite d'histoire et de sociologie politique à Sciences po et à l'Université LUISS de Rome
  • Michelangelo Giampaoli Anthropologue à l’université De Paul de Chicago

Il est désormais possible de connaître l'emploi du temps quotidien de Giorgia Meloni, présidente du Conseil italien depuis le 22 octobre, car il est relayé par les agences de presse. Elle s'est rendue le dimanche 22 janvier 2023 en Algérie pour une « visite de travail amicale » et pour parler des contrats récents d’achat de pétrole par les entreprises italiennes. Elle s’est entretenue avec Emmanuel Macron lors d'une discussion téléphonique "cordiale" pour parler tout à la fois investissements et gestion des flux migratoires. Ou encore, elle était pour Noël aux côtés des soldats italiens déployés en Irak.

Comme n’importe quel chef d’État ou de gouvernement, on dit qu'elle a été démocratiquement élue. Ce qui est son cas puisque son parti a obtenu 26 % des voix aux élections législatives de septembre 2022, au sein d’une coalition de droite et d’extrême-droite. Mais ce sans nécessairement se rappeler, à chaque fois, les propos de la jeune Giorgia Meloni sur Mussolini en 1996, ni les origines de Fratelli d’Italia- descendant direct de partis créés par des nostalgiques du fascisme : le MSI, au sujet duquel une proche de Meloni, sous-secrétaire à la Défense, disait en décembre 2022 : "Les racines profondes ne gèlent pas".

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Si Giorgia Meloni clôt le débat sur sa filiation au fascisme en le reléguant aux livres d’histoire, quel rapport son parti entretient-il avec cette histoire ? Comment a-t-il évolué au gré de sa montée en puissance dans les urnes ?

Pour répondre à ces questions, Julie Gacon reçoit Stefanie Prezioso, professeure d’histoire contemporaine et à l’université de Lausanne ainsi que Marc Lazar, professeur émérite d’histoire et de sociologie politique à Sciences Po Paris.

"Le discours que tient Giorgia Meloni est une forme de relecture du passé fasciste qui, tout en condamnant une partie de ce passé, n'établit pas de rapport et d'analyse à propos de ce que le fascisme a rendu possible ou de ce qu'il a fait", observe Stefanie Prezioso.

"Par rapport au fascisme historique, 1919-1945, Giorgia Meloni a une stratégie d'évitement. Là où on peut voir un filon idéologique qui s'apparente au fascisme, c'est dans sa position anti-Lumières", complète Marc Lazar.

Seconde partie : le focus du jour

La tombe de Mussolini, creuset de la nostalgie du “vrai” fascisme

Un militant d'extrême-droite fait la salut fasciste devant la tombe de Mussolini située dans son village de naissance, Predappio, lors de la célébration des 90 ans de la marche sur Rome, le 28/10/12
Un militant d'extrême-droite fait la salut fasciste devant la tombe de Mussolini située dans son village de naissance, Predappio, lors de la célébration des 90 ans de la marche sur Rome, le 28/10/12
© AFP - Tiziana Fabi

A mesure que Fratelli d’Italia police son image pour mieux gouverner, les tenants d’un fascisme pur et dur s’en détournent pour mieux se retrouver autour des derniers vestiges du régime mussolinien. Parmi eux, la tombe du Duce, enterré dans son village de Predappio, constitue l’un des principaux points de rendez-vous des nostalgiques, jusqu’à rassembler 2000 personnes fin octobre dernier. Comment la sépulture de Mussolini a-t-elle été peu à peu érigée en enjeu mémoriel et politique de premier plan en Italie ?

Avec Michelangelo Giampaoli, anthropologue à l’université De Paul de Chicago et auteur de l’article “La tombe de Mussolini à Predappio : itinéraire d’un antihéros” paru dans la revue Ethnologie française en 2016.

"La plupart des personnes qui visitent la tombe de Mussolini sont nostalgiques de quelque chose qu'ils n'ont pas vécu. Mais en se rendant sur ce lieu de mémoire, ils cherchent à retrouver d'autres personnes qui comme elles, n'ont pas la possibilité d'être représentées au niveau politique", explique Michelangelo Giampaoli.

Une émission préparée par Barthélémy Gaillard.

Références sonores et musicales

  • Italie : "le fascisme appartient à l'Histoire", selon Giorgia Meloni ( Le Figaro - 10/08/22)
  • Pour la célébration de Hannukkah mi-décembre 2022, Giorgia Meloni s’adresse à la communauté juive italienne ( Fratelli d'Italia - 19/12/22)
  • Giorgia Meloni en 1996 : "Je crois que Mussolini était un bon politicien" ( INA - 01/09/22)
  • Leader du MSI et mentor politique de Giorgia Meloni, Gianfranco Fini qualifie le fascisme de “mal absolu” lors d’un voyage à Jérusalem ( AP Archive - 21/07/15)
  • Les nostalgiques de Mussolini ( Mise au point - 19/09/22)
  • "Hey Saturday Sun" de Boards of Canada
  • " Soldi" de Mahmood (2019)

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